Interview d’Isabelle Bordy: « Les partis traditionnels endossent une responsabilité très forte dans la montée du FN »
La co-présidente du mouvement non-partisan, Nous Citoyens, revient sur l’actualité de ses dernières semaines. Isabelle Bordry évoque avec nous les élections départementales, la montée du FN, la situation économique en France et en Europe et défend l’alternative de son mouvement issu de la société civile.
Quelle a été votre réaction lorsque Manuel Valls a dit que la montée du Front national lui faisait peur ?
Stigmatiser n’est pas positif. Il aurait fallu avoir une vraie politique de remise en cause et comprendre pourquoi les gens se désintéressent et ne votent plus pour le PS ou l’UMP.
Les partis traditionnels endossent une responsabilité très forte dans la montée du FN. Pourquoi ? Parce qu’ils se sont coupés du terrain et des citoyens. Ils ont été incapables de se renouveler, de se rénover. Ils sont dans un déni. Ils créent une rupture complète avec les citoyens.
Je pense que même s’il est important d’expliquer les programmes des uns contre ceux des autres, il est d’autant plus important d’expliquer en quoi le Front national n’est pas une bonne solution pour le pays mais avec des arguments économiques et sociétaux, d’expliquer que les Français font erreur en votant pour eux ; et que s’ils veulent une alternative, ce n’est peut-être pas là qu’elle est.
Quand on est en plus dans une situation économique où l’on a plus de 10% de chômeurs, où les classes moyennes s’appauvrissent, que l’on s’aperçoit que l’impôt n’est plus aussi efficace qu’il l’était précédemment dans sa vie quotidienne, cela donne aujourd’hui des choix épouvantables avec des partis d’extrême qui vont peut-être faire 30% aux départementales au lieu des 25% aux élections précédentes, comme aux Européennes.
Qu’est-ce que Nous Citoyens propose de différent pour attirer l’attention des citoyens ?
Notre mouvement s’engage depuis deux ans sur la scène politique pour proposer une alternative pertinente en disant que la politique ne doit plus être un métier et qu’il faut mettre en avant des citoyens qui ont pour mission de s’engager dans la vie publique sans cumuler de mandat pour porter un projet, des réformes et faire en sorte que le pays retombe sur les rails.
Pour les élections départementales, nous proposons 20 binômes qui s’engagent à ne faire qu’un mandat et qui viennent tous de la société civile. Par exemple, une cancérologue pédiatre à Trousseau très engagée au niveau associatif, une femme remarquable qui se présente à Saint-Maur-des-Fossés dans le Val de Marne. Vous avez des profils plus diversifiés dans la région PACA comme un nutritionniste ou encore un tailleur de pierres très engagé dans la sauvegarde du patrimoine en binôme avec une étudiante.
Bref, nous sommes très différents des autres candidats qui ont une double ou triple casquette. Effectivement, les électeurs ont l’impression que tous ces politiques cumulent des salaires sans forcément cumuler une efficacité sur chacun des postes ou chacun des mandats pour lesquels ils ont été élus. Nos candidats se lèvent pour expliquer qu’il y a une alternative aux partis traditionnels, qu’il y a un vrai discours crédible avec des engagements forts, d’exemplarité en termes de vie publique.
Quelles sont les valeurs défendues par votre mouvement Nous Citoyens ?
Les valeurs fondatrices du mouvement sont solidarité, confiance, exemplarité avec des objectifs de renouvellement de la vie politique et faire en sorte que l’intérêt général soit la mission première des personnes élues et non pas uniquement seconde après son intérêt personnel qui est la vision aujourd’hui qu’ont beaucoup de gens de la politique en France.
Comment faire adhérer ses valeurs à des personnes de plus en plus réfractaires à la chose publique et à la vie de la cité ?
Ce discours quand vous l’expliquer est celui qui remporte le plus d’adhésion. Après, on est plus ou moins d’accord sur notre approche sociale-démocrate comme le respect des solidarités ou l’efficacité de l’impôt, sur le type de réformes à adopter, à quel rythme et sous quelle forme. Mais aujourd’hui expliquer qu’il est absolument nécessaire de renouveler le personnel politique et faire monter en puissance des personnes de la société civile, quand nous sommes en réunion publique, cela ne fait pas débat. Les gens réclament ces idées. La difficulté que l’on a est plus de faire passer ce message et faire connaître les profils présentés par Nous Citoyens. À partir du moment où les gens prennent connaissance des profils, de la qualité des représentants du mouvement, on a une adhésion réelle.
L’Islande retire sa candidature à l’adhésion de l ‘Union européenne, estimant que ses intérêts sont mieux servis en dehors l’union avec un taux de croissance nationale de 2%, même si elle promet de maintenir des liens étroits avec l’Europe. Leur discours est que « si vous voulez que votre économie soit compétitive dans les domaines importants du 21ème siècle, il faut laisser les banques s’écrouler ». Qu’en pensez-vous ?
Je pense qu’un système financier sain et soutenu est absolument indispensable au développement de l’économie, notamment pour les PME. On ne peut pas dire que l’on est contre les banques comme ça. Regardez ce que disait François Hollande au sujet de la Finance : elle était son ennemi numéro un. Aujourd’hui, la réalité est telle qu’il s’aperçoit que ce n’est pas aussi simple.
Après, est-ce qu’il y a eu des erreurs, des spéculations, des bulles ? Je pense qu’il y en a de manière cyclique. Il y a eu la bulle Internet, la bulle des subprimes. Il faut effectivement les éviter au maximum. Il faut aussi des régulations fortes pour pouvoir éviter ces excès.
Après, le cas de l’Islande est très spécifique. Ce pays a fait faillite et est encore marqué par cette époque. Du coup, c’est une réaction par rapport à un événement assez exceptionnel et qui aurait pu arriver à la Grèce si l’Europe n’avait pas été là. Un pays qui ne prélève pas correctement l’impôt, qui ne gère pas correctement ses Finances publiques peut se retrouver dans une situation difficile et là en l’occurrence l’Europe a évité une catastrophe en Grèce. Alors bien sûr, il est très difficile de savoir ce que ça aurait pu être si l’Europe n’avait pas été là, mais la réalité est telle que les gens seraient allés dans leur banque et il n’y aurait plus eu d’argent sur leur compte. L’Europe a évité ça. Bien sûr, cela met une pression sur les gouvernements qui s’enchaînent pour mettre en place leur réforme et faire des économies pour qu’ils puissent rembourser aux contribuables européens ce qui leur a été prêté.
Qu’est-ce qu’il manque, selon vous, à notre pays pour redonner de la ferveur à nos entreprises, comme créer des emplois et de la richesse ?
Quand vous êtes patron de PME aujourd’hui, et ça m’est arrivé encore récemment, il est très difficile d’établir une fiche de paie. Vous embauchez quelqu’un, vous n’arrivez pas à faire sa feuille de paie. Nous sommes arrivés à un millefeuille administratif très compliqué pour les PME, une fiscalité qui bouge en permanence. C’est donc très compliqué pour un patron de TPE ou PME d’être serein lorsqu’il développe son entreprise, notamment en embauchant de nouveaux salariés. C’est la fameuse main qui tremble à la signature d’un contrat.
Les charges sont énormes et elles évoluent en permanence. Elles sont la plupart du temps impossible à anticiper. Je préfèrerai payer bien plus cher mes équipes plutôt que d’en donner autant à l’État. Aujourd’hui, l’emploi est la richesse la plus taxée en France. Réfléchissez … Lorsque vous avez un produit sur le marché et que vous ne voulez pas que ce produit trouve acheteur, vous le taxez énormément, comme les produits de luxe ou les produits non essentiels. En réalité, quand vous y réfléchissez : l’emploi est taxé de telle manière que l’on pourrait le comparer à un produit non essentiel !
Les charges trop élevées, les incertitudes de la fiscalité, tout ceci empêche l’entrepreneur de se développer sereinement et surtout d’être focalisé sur les marchés qu’il veut développer. Il se retrouve à traiter pendant un temps immense des problèmes administratifs qui pourraient sûrement être simplifiés.
Et qu’est-ce que Nous Citoyens propose à ce sujet ?
Il y a beaucoup de choses. Sur les contrats, nous proposons un contrat unique qui dans la réalité est un CDD, parce que vous vous apercevez que 80% des embauches sont faites avec un CDD, le CDI ne correspondant plus aux besoins du marché. Nous sommes également pour les allègements de charge pour tous les salaires jusqu’à 1,5 SMIC, pour créer un appel d’air car les chômeurs de longue durée sont en général les moins diplômés. D’après nos calculs, il faudrait faire 200 milliards d’économies de manière à réaliser des réformes profondes de la dépense publique. Toute une réflexion a été menée à bien sur ces sujets et est toujours en cours dans les différentes commissions de Nous Citoyens.
Il faut que la France arrive à s’adapter avec les contraintes d’aujourd’hui, avec l’évolution de l’économie mondiale. En fait, les nouvelles économies nous apprennent que l’agilité est un élément essentiel. Et la France a perdu de son agilité, autrement dit la capacité à se rénover, la capacité des chefs d’entreprise à pouvoir saisir de nouveaux marchés pour créer de la richesse. Il faut redonner optimisme et capacité à innover. Agir vite est indispensable dans une économie en mouvement permanent pour que la France reste une puissance importante.
G.B.
Chahuneau
Non. C ‘est le systeme international financier qui abuse rituellement tout envie democratique, et nos paradis fiscaux europeens. Les gens sont sages parce que l ‘alternative pcf a demontre sa nocivite au sujet des droits individuels et democratiques. Il faudrait pas mal de Jean Tiroles reunis autour du malade et de ses profiteurs armes
Anonyme
4.5