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« Pour une République Sociale » ??? Par Stéphane Geyres

 

 

La vie à Paris est fascinante, surtout en temps de grèves, c’est-à-dire souvent. Ainsi, on croise dans le RER des « jeunes » pourtant officiellement adultes qui arborent fièrement quelques pancartes de carton improvisées tels des trophées, sur lesquelles on peut lire : « Pour une république sociale ! »

Ma première réaction fut de leur demander ce que pouvait vouloir dire une république « asociale » ou « non-sociale », vu que la république décrit une société et que toute société est… sociale. Je vous passe les noms d’oiseaux comme j’ai passé mon chemin. Donnez l’impression que vous critiquez la demande du peuple pour du « social » et vous voilà banni hors du champ de la liberté d’expression.

Une république sociale, une « chose publique » sociale, ce doit être je suppose une société où la seule préoccupation consiste à aider son prochain ? A moins que ce soit le contraire ? Mais pour aider son prochain, de quoi part-on ? De ce qu’on a gagné, ou de ce que la république nous donne ?

Bref, j’arrête là la caricature. En réalité, je me suis peu après rendu compte que ce qui me gênait le plus dans ce slogan, ce n’était pas tant le « social » que le « pour » (même s’il change de « contre »).

Car en effet, être « pour » ceci ou « pour » cela et le revendiquer, ce n’est rien d’autre qu’exiger, du moins attendre d’autrui quelque action qui ne serait pas naturellement adoptée. Dit autrement, être pour la « république sociale », quoi que cela puisse être, c’est attendre des autres qu’ils l’adoptent, qu’ils en conviennent, voire qu’ils s’y conforment, quand la chose ne leur serait sinon pas spontanée.

Ce n’est donc ni plus ni moins que chercher à imposer un choix de fonctionnement social à autrui, ou dit autrement, attendre de ce cher état qu’il impose à autrui des choix essentiellement impopulaires.

Il y a donc chez ces jeunes une triple incompréhension du fonctionnement social – à ce point, en 2016, c’est affligeant : a) on ne se met pas en position d’imposer ses vues à autrui, on explique, on négocie ; b) une république est toujours sociale, pourvu que chacun commence par y prendre sa place en respectant celle des autres ; et c) si la société actuelle ne leur prépare pas l’avenir le plus radieux, la solutions n’est pas au bout d’une pancarte mais plutôt sur la page d’un curriculum vitae.

En fait oui, je suis pour une république sociale moi aussi. Sociale au point qu’il ne servirait à rien de défiler dans la rue. Car de toute façon, il n’y aurait personne pour se pencher sur tous nos caprices.

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