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« Mais le football, c’est comme la vie, le football, c’est la vie où tout est et sera toujours possible. » par Alexandre Melnik

Après la fin de l’Euro, qui rythmait nos vies pendant un mois, il faudra réapprendre à vivre sans la présence quotidienne du football.

A titre personnel, depuis mon enfance, j’ai une relation très intime, quasi-existentielle avec ce jeu. Dans l’étouffant huis clos du communisme où je suis né, le football fut ma bouffée d’oxygène, ma fenêtre secrète sur le monde, ma subliminale projection vers l’avenir. Cette passion, confinant à la folie, et, en tout cas, disproportionnée par rapport à ce qui semble, au premier abord, un simple jeu, je l’ai miraculeusement gardée, malgré tous les zigzags de ma vie, celle d’un ex-diplomate soviétique devenu un « apôtre » du libéralisme et de la globalisation du XXI siècle, comme l’on garde sur soi, en toutes circonstances, un porte-bonheur, dont vous êtes le seul à connaître la signification profonde.

A la veille de la finale de l’Euro, je me sentais à la fois heureux et gêné quand la France entière, toutes convictions et différences confondues, s’est soudain convertie à ce que je ressentais personnellement, depuis toujours, au plus profond de moi-même par rapport au football. Cette France qui se donnait, avec un exhibitionnisme assumé, sous la loupe grossissante des médias, à des « rites » qui, dans mon esprit, était réservés à un cercle d’initiés relativement restreint. C’est comme si ma petite église où je me rendais tout seul en catimini est devenue, du jour au lendemain, un Disneyland assailli de foules.

Et c’est à ce moment-là, en transcendant ma gêne personnelle, que j’ai repris conscience de toute la puissance du football, un jeu de génie qui allie, comme nul autre, la simplicité des fondamentaux et l’inépuisable diversité des options. Plus qu’un jeu : aussi stupéfiant  que cela puisse paraître, le football s’impose aujourd’hui comme le seul vecteur planétaire de rassemblement, de paix, bref – de communion de nations et d’individus dans notre monde global, plat, instantané, en proie à d’innombrables désunions.

Bien sûr, je supportais les Bleus, car souvent pendant cet Euro, ils ont démontré leur soif de la compétition, leur faim de gagner, en allant au combat avec vaillance et panache, en laissant aux vestiaires leurs petits calculs, leurs fortunes et leur notoriété, comme s’ils jouaient au football pour la première fois de leurs vies. Comme s’ils redevenaient eux-mêmes, tels qu’ils étaient il y a quelques années, à savoir – les enfants, délicieusement naïfs et impétueux, guidés uniquement par le bonheur de taper dans le ballon. En redonnant ainsi l’authenticité au football qui est, au fond, une alchimie qui permet de reprendre la vie à zéro, le temps d’un match !

Bien entendu, j’appelais de mes vœux la victoire de l’équipe de France. Une victoire qui  nous aurait permis, à nous tous, de vivre à l’unisson un fragment de bonheur collectif, partout, dans tous les coins et recoins de l’Hexagone, comme si la France toute entière, à l’image d’une famille enfin réunie, célébrait un mariage de rêve, retransmis et ovationné en direct à travers la planète.

Le football aurait pu accomplir ce miracle de faire rimer  France, bonheur et rêve !

Et bien entendu aussi, au lendemain de la défaite, j’éprouve l’immense frustration blessant mon cœur qui battait fort, trop fort au rythme de cet espoir démesuré. Malaise. Malaise. Malaise.

Mais le football, c’est comme la vie, le football, c’est la vie où tout est et sera toujours possible. A condition d’y croire. A condition de rester soi-même. A condition de construire son avenir qui s’ouvre toujours à nous.

Alexandre Melnik

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