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Le jeu dangereux des politiques face à l’islam

 

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Il est étonnant de constater que la plupart des hommes politiques ont conservé tous les vieux réflexes de l’anticléricalisme, tandis que, face à l’islam, ces réflexes semblent endormis. Comment peut-on l’expliquer ?

Certes, les hommes politiques manquent en général d’imagination, et même d’idées générales. Ce n’est pas étonnant, car ils sortent en grand nombre d’écoles qui sont des éteignoirs d’originalité. Après avoir passé toute leur jeunesse à se demander : « Qu’est-ce qu’il faut que je dise pour être reçu au concours ? », ils passent le reste de leur vie à se demander : « Qu’est-ce qu’il faut que je dise pour être élu ? » Les notions de conviction, et même de vérité, leurs deviennent étrangères. Leur complaisance envers l’islam découle, certes, de leur crainte d’être taxés de « racisme ». Les affirmations inlassablement répétées – sans aucune preuve – selon lesquelles « l’islam est compatible avec la république » ou même qu’il « fait partie de l’identité française » sont des gages donnés en ce sens. Mais ce n’est pas tout.

Ceux qui n’ont que le mot « république » à la bouche se sont habitués à un système dans lequel le pouvoir législatif et exécutif – qui marchent du même pas, tant le premier est subordonné au second – se croient permis de régenter l’existence des individus dans ses moindres détails, de s’emparer de leurs biens, et à présent d’édicter les règles morales, y compris en ce qui concerne le droit de vie et de mort. On peut parler de pouvoir « totalitaire », en ce sens qu’il touche tous les aspects de la vie.

Les rois aussi ont cherché à éliminer tout pouvoir rival du leur : aristocratique, provincial, municipal, et surtout religieux. Les dogmes de l’Eglise, notamment, étaient un obstacle à leur soif de toute-puissance. La solution a été tantôt de soumettre l’Eglise à leur propre autorité (dans le cas de l’anglicanisme), tantôt d’essayer de la chasser de la sphère publique. Pourtant, face à l’islam, loin de s’écrier : « Ecrasons l’infâme ! », beaucoup s’échinent à proclamer que cette religion a toute sa place en France, qu’il est tout à fait compatible avec la république.

Ce n’est peut-être pas aussi étonnant qu’il n’y paraît. Avec l’islam, le pouvoir politique se trouve en effet face à une puissance de même nature que la sienne. La république s’autoproclame « une et indivisible », tandis que l’islam proclame qu’« il n’y a de dieu que Dieu ». L’une et l’autre s’immiscent dans tous les aspects de l’existence. Mais, au fond, l’islam est surtout un recueil de préceptes de nature juridique, qui énoncent ce qui est permis, ce qui est défendu et ce qui est obligatoire. L’une et l’autre ont une vocation universelle, et sont, de ce fait, conquérants. Mais c’est aussi ce qui fait que, même quand ils s’opposent, ils se comprennent.

Il existe certes des marchandages purs et simples, qui permettent à des élus d’obtenir des voix en échange de faveurs, telle la construction d’une mosquée. Mais la combine électorale ne suffit pas à expliquer la complaisance, voire la préférence de biens des élus envers l’islam. Le responsable politique et le responsable musulman parlent en réalité le même langage. Pour obtenir des avantages, l’imam est prêt à accorder des concessions. Pour obtenir des voix ou embellir leur réputation, les politiques font de même.

Il n’en va pas de même avec le christianisme. L’empereur Auguste ne comprenait pas pourquoi les chrétiens refusaient de lui rendre un culte, à côté du leur – qu’il aurait été prêt à tolérer. Les politiques d’aujourd’hui lui ressemblent : ils ont du mal à admettre qu’à partir d’un certain point, le chrétien doit dire, comme les apôtres à qui on ordonnait de cesser d’annoncer l’Evangile : « Non possumus. »

Le credo des chrétiens ne commence pas comme la profession de foi de l’islam, ni comme une proclamation républicaine. Ses premiers mots sont : « Je crois. » Commencer par dire qu’on croit, c’est admettre qu’il est possible de ne pas croire. Cela ménage une place, dans l’esprit humain, qui ne peut être régentée par nul autre que lui-même. Cela implique aussi qu’on ne peut pas déduire tout l’ordre social des articles du credo. En ce sens, le christianisme est compatible avec n’importe quelle forme de régime politique.

Mais croire, et non pas seulement proclamer ce qui est ou devrait être, implique aussi la nécessité d’une conversion intérieure – qui va bien au-delà de la simple appartenance à une communauté. Cela implique une conscience individuelle, un libre arbitre susceptible d’entrer en contradiction avec la morale courante et les ordres du gouvernement. Voilà ce qui explique la réflexion désormais célèbre de M. Peillon : « On ne pourra jamais construire un pays de liberté avec le catholicisme. »

Pourtant, l’Evangile ne dit-il pas que « la vérité rend libre » ? Oui, mais elle rend libre en dehors des décrets du gouvernement. Or, aux yeux de M. Peillon et de quelques autres, la liberté réside essentiellement dans la volonté générale, qui s’incarne dans la république et au bout du compte dans la représentation nationale. Quiconque remet en cause les décisions du législateur, au nom d’une vérité supérieure, conteste donc la volonté générale, devient l’ennemi de tous et de la république elle-même.

Voilà pourquoi les pouvoirs publics et les hommes politiques trouvent beaucoup plus commode de négocier avec un musulman. La taqiya, c’est le contraire du non possumus : cela laisse toujours place à la négociation et c’est même pour ça que ça existe. Toutefois, ceux qui négocient avec l’islam devraient se souvenir que l’islam ne négocie qu’aussi longtemps qu’il est le plus faible. Une fois qu’il est le plus fort, il redevient ce qu’il n’avait jamais cessé d’être : une religion. Ceux qui font de la politique se croient en terrain connu. Ils ne devraient oublier qu’en politique, le but n’est pas de cohabiter avec l’adversaire, mais de le remplacer.

  1. Peillon est peut-être prophète, plus qu’il ne le croit, quand il déclare : « Ce qui manque au socialisme pour s’accomplir comme la pensée des temps nouveaux, c’est une religion nouvelle: donc un nouveau dogme, un nouveau régime, un nouveau culte doivent surgir, afin qu’une nouvelle société prenne la place de l’ancienne. »
  2. Pierre de Laubier.

 

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