André Derain au Centre Pompidou par Sandrine de La Houssière
Le Centre Pompidou présente André Derain 1904 – 1914. La décennie radicale, un nouveau regard porté sur l’œuvre de cet artiste majeur du 20e siècle, avec pour ambition de retracer les étapes du parcours de l’artiste avant-guerre, moment où le peintre participe aux mouvements d’avant-garde les plus radicaux. Quelques ensembles exceptionnels sont réunis pour l’exposition : la production estivale de 1905 à Collioure, la série des vues de Londres et les très grandes compositions autour des thèmes de la danse et des baigneuses.
Derain commence à peindre à Chatou sa ville natale en 1895. Gertrude Stein a pu dire de lui avec quelque perfidie:« Derain est un inventeur, un découvreur, un de ces esprits perpétuellement curieux et qui ne savent pas tirer parti de leurs inventions (…) c’est un aventurier de l’art, le Christophe Colomb de l’art moderne, mais ce sont les autres qui profitent des nouveaux continents.»
L’art d’André Derain n’a pas donné lieu à de grandes monographies depuis la rétrospective que le Musée d’Art moderne de la Ville de Paris a consacré à son œuvre en 1994, soit depuis plus de vingt ans.
Ce peintre français a joué un rôle moteur et intellectuel dans l’éclosion des deux grandes avant-gardes du début du 20e siècle, le fauvisme et le cubisme.
Témoins, les toiles peintes à Collioure auprès de Matisse, au chromatisme rutilant posé en aplat, la toile restant vierge à certains endroits ; celles peintes à Londres pour Ambroise Vollard (« Big Ben » : magnifique féerie colorée). Derain est alors proche de Maurice de Vlaminck et d’Henri Matisse, puis de Georges Braque et de Pablo Picasso, il se confronte avec force au fauvisme et au cubisme et développe jusqu’à la Première Guerre mondiale une œuvre puissante.
On retiendra « La danse »1904, sarabande élégiaque d’une liturgie sacrée, emblématique de du néoprimitivisme moderne et poétique
Multipliant les expérimentations plastiques, Derain aborde la peinture, le dessin, la xylographie, la sculpture, la céramique, le cinéma, et pratique jusqu’à la fin de sa vie, en parallèle de sa peinture, la photographie.
Mais juste avant la guerre il engage en solitaire un retour précoce au réalisme, annonçant tous les mouvements figuratifs de réalisme magique, depuis l’Ingrisme de Picasso, la peinture métaphysique de De Chirico ou la Nouvelle Objectivité allemande. Il s’écarte des milieux avant-gardiste, revient à la tradition figurative (sans avoir jamais toutefois, cédé à la tentation de l’abstraction) : c’est sa période de « réalisme magique ». La belle toile « Le samedi » présentée à Beaubourg témoigne d’une interrogation métaphysique qui reste une préoccupation de l’artiste : elle évoque le lendemain du Vendredi saint dans un espace construit comme un intérieur hollandais du XVII° siècle.
Derain mourra seul ,ostracisé en 1954
Le parcours recouvre une période de dix ans (« la décennie radicale ») 1904-1914, période intense, très complémentaire avec l’événement du musée d’art moderne de Paris qui présente une exposition inédite explorant l’amitié entre trois artistes majeurs du XXe siècle : André Derain (1880-1954), Balthus (1908-2001) et Alberto Giacometti (1901-1966) jusqu’au 29 octobre
La conception de cette exposition s’appuie sur une exploration des archives inédites de Derain – ses photographies, sa collection d’estampes et de reproductions d’œuvres d’art, ses écrits et sa correspondance – et éclaire de manière sensible et inédite une sélection de ses œuvres les plus emblématiques, par des contrepoints visuels forts : les photographies prises par André Derain, ses références artistiques atypiques telles que les gravures d’Epinal, les objets maoris copiés au British Museum en 1906 ou les sculptures africaines de sa collection.
L’exposition présente environ 70 peintures ainsi qu’un ensemble important d’œuvres sur papier – aquarelles, dessins, carnets de croquis, gravures -, des sculptures, une cinquantaine de photographies, des sculptures maories et africaines, des céramiques…
