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  Laure Villacreces : L’intelligence collective, la clé de la gestion de crise pour Emmanuel Macron  

La politique en période de crise se doit d’évoluer pour répondre aux défis complexes et souvent contradictoires auxquels nos sociétés sont confrontées. La mondialisation, la transition écologique, la crise sanitaire mondiale de la Covid-19 et les crises économiques successives ont mis en lumière la nécessité d’adapter les pratiques politiques à des réalités en constante évolution. Cependant, il est impératif que les responsables politiques intègrent l’intelligence collective dans leur processus décisionnel, car cette approche collaborative devient, plus que jamais, une condition sine qua non pour reconstruire la confiance démocratique, favoriser le dialogue et trouver des solutions durables face aux crises multiples que nous traversons.

Une nouvelle ère de crises et de fractures sociales

La notion de crise en politique n’est pas nouvelle. Elle a toujours existé sous différentes formes, mais ces dernières décennies, elle s’est intensifiée, se diversifiant en crises économiques, sociales, écologiques et sanitaires. Par exemple, la crise financière mondiale de 2008 a révélé l’instabilité du système économique global, engendrant des conséquences dramatiques pour les classes moyennes et populaires. Plus récemment, la crise des Gilets Jaunes en France a mis en lumière des fractures sociales profondes, entre les zones urbaines et rurales, entre les jeunes générations et les générations plus âgées, mais aussi entre les différentes classes sociales. Ce type de crise n’est pas unique à la France, il touche aussi bien d’autres pays européens qu’outre-Atlantique. La polarisation politique s’intensifie de plus en plus, créant des tensions et des divisions qui ne font qu’aggraver les crises existantes.

Face à ces crises, une réponse politique unifiée et structurée est nécessaire. Cependant, une réponse politique efficace ne peut pas venir d’un groupe restreint d’experts ou de dirigeants. Elle doit émerger d’un processus de décision qui intègre une diversité d’opinions, de perspectives et d’expériences. C’est là qu’intervient l’intelligence collective : elle permet d’unir des points de vue divergents, issus de différentes sensibilités sociales, économiques et politiques, pour parvenir à une solution commune. L’intelligence collective, loin de nier les divergences, les prend en compte et les utilise comme des leviers pour construire des solutions plus inclusives et durables.

Le rôle fondamental de l’intelligence collective face aux crises sociales et politiques

Les crises politiques exacerbent souvent les fractures au sein de la société. Ces fractures ne se contentent pas de diviser les citoyens, elles génèrent également une méfiance croissante envers les institutions et les responsables politiques. Ce manque de confiance alimente des phénomènes de rejet des élites et des partis traditionnels, comme en témoigne la montée du populisme à travers le monde. Les électeurs, frustrés par le manque de réponses à leurs attentes, se tournent souvent vers des leaders populistes qui promettent de « rompre avec le système » et de restaurer un ordre social qu’ils estiment perdu. Mais si l’on examine de plus près ces mouvements populistes, on constate qu’ils exploitent les divisions pour instaurer un climat de méfiance généralisée, et qu’ils n’apportent que des solutions simplistes, voire dangereuses, qui fragilisent davantage le tissu social.

Dans ce contexte, l’intelligence collective devient une réponse puissante à la polarisation et à l’atomisation des sociétés. Elle permet de réunir toutes les parties prenantes autour de la table : citoyens, syndicats, entreprises, associations, experts, responsables politiques. Ce processus collaboratif permet d’unir des points de vue divergents, tout en cherchant à dépasser les clivages et à atteindre un consensus qui, tout en respectant les différences, permet d’avancer ensemble vers des solutions partagées. En revanche, une telle approche nécessite un changement de culture politique : il s’agit de mettre de côté les intérêts partisans pour chercher l’intérêt général. Ce changement de posture n’est pas facile, mais il est essentiel si l’on veut éviter que la crise politique ne dégénère en une crise démocratique.

Redonner de la légitimité à la politique par la participation citoyenne

Une des conséquences majeures des crises politiques actuelles est la perte de confiance dans les institutions démocratiques. Le sentiment grandissant d’être écarté des processus de décision, combiné au manque de transparence des gouvernements, engendre un climat de défiance généralisée. Les citoyens, déconnectés des enjeux politiques, se sentent souvent impuissants, comme si leurs voix n’étaient plus entendues par ceux qui sont censés les représenter. La crise des Gilets Jaunes a bien montré cette fracture entre les dirigeants politiques et une partie significative de la population, souvent perçue comme oubliée par les politiques publiques.

Cependant, l’intelligence collective offre une solution pour restaurer cette relation de confiance. En effet, elle permet aux citoyens de participer activement au processus décisionnel, en amont, pendant, et après les décisions politiques. Cette participation peut prendre la forme de consultations publiques, de débats citoyens, de comités d’experts ouverts à tous, ou encore de mécanismes de démocratie participative, qui permettent de rendre les citoyens acteurs du changement et non plus simples récepteurs des décisions prises par les élites. Cela permet non seulement de renforcer la légitimité des décisions, mais aussi de redonner un sens à la politique, en la rapprochant des préoccupations réelles des citoyens.

Dans ce contexte, l’intelligence collective devient une réponse puissante à la polarisation et à l’atomisation des sociétés

Cette approche est non seulement un moyen de redonner de la légitimité aux institutions, mais elle permet aussi de repenser la manière dont la politique est menée. Trop souvent, les réformes sont imposées du haut vers le bas, sans consultation préalable, ce qui engendre incompréhension, rejet et résistance. Par exemple, les réformes des retraites en France ont été perçues par une grande partie de la population comme une décision imposée par le gouvernement, sans prise en compte des réalités vécues par les citoyens. L’intelligence collective, en offrant une véritable consultation, permet de faire émerger des solutions plus adaptées et plus acceptées.

La nécessité d’une gouvernance collaborative et partagée

Une autre dimension importante de l’intelligence collective en politique est qu’elle permet de dépasser la logique de décision top-down, où une petite élite décide pour le reste de la population, sans réellement consulter ou écouter les besoins de cette dernière. Le processus collaboratif permet de faire émerger des idées issues de la diversité des expériences, des expertises et des compétences, plutôt que de se limiter à un petit groupe d’experts ou de décideurs qui, bien que bien intentionnés, ne peuvent à eux seuls comprendre l’ensemble des défis auxquels la société fait face.

Prenons l’exemple de la gestion de la crise sanitaire de la Covid-19. Bien que les gouvernements aient pris des décisions majeures pour lutter contre la propagation du virus, les réponses locales et communautaires ont montré l’importance de la coopération de tous les acteurs de la société : soignants, chercheurs, élus locaux, associations et citoyens. Dans certains pays, l’intégration de l’intelligence collective a permis de trouver des solutions innovantes pour la distribution des soins ou l’accompagnement des populations les plus vulnérables. Ces réponses locales et partagées ont souvent été plus efficaces que les solutions imposées d’en haut, soulignant la pertinence d’une gouvernance plus ouverte et participative.

Le renforcement des institutions démocratiques par la coopération

Les crises politiques sont également un test pour la solidité des institutions démocratiques. Dans un contexte de défiance croissante, la tentation de l’autoritarisme se fait souvent sentir. Dans ces moments de tension, les gouvernements peuvent être tentés de centraliser le pouvoir, d’adopter des mesures répressives ou de simplifier la gestion de la crise en prenant des décisions autoritaires. Cependant, l’intelligence collective offre une alternative à cette tentation, en enrichissant la prise de décision de perspectives variées, garantissant ainsi des solutions plus équilibrées, plus justes et plus durables. Elle invite à une réflexion collective, où chaque voix, chaque opinion, a son importance. Ce processus, bien qu’il puisse être plus long et plus complexe, est indispensable pour éviter la dérive autoritaire et renforcer la résilience des institutions démocratiques face à la crise.

En effet, les crises offrent une opportunité de renforcer les mécanismes démocratiques et d’améliorer leur fonctionnement. Plutôt que de réduire les espaces de délibération, il faut au contraire les élargir. L’intelligence collective, en multipliant les points de vue et les échanges, permet de garantir que les décisions prises sont les plus justes et les plus équitables possible.

Le leadership politique face à l’intelligence collective

Enfin, l’intelligence collective implique également un changement profond dans la manière dont les responsables politiques exercent leur pouvoir. L’une des caractéristiques de l’intelligence collective est qu’elle ne repose pas sur l’idée d’un pouvoir centralisé et absolu, mais sur la coopération, la mise en commun des idées et des compétences. Pour que cette dynamique soit efficace, les responsables politiques doivent accepter de partager le pouvoir, d’écouter les autres et de se remettre en question.

Cela ne signifie pas que les dirigeants doivent renoncer à leurs responsabilités ou à leur pouvoir décisionnel. Au contraire, un leadership basé sur l’intelligence collective peut renforcer la légitimité et la capacité d’action des dirigeants. En réorientant leur rôle.

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