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Alors,on ne peut plus rien dire ?par FANTOMAS

 

Quand François Fillon évoque, je cite : « un climat de quasi guerre civile », il suscite aussitôt les plus vives réactions indignées. Comment, disent de concert journalistes et chercheurs, peut-on parler de « guerre civile » à propos de la situation française ? Et nos fins experts de nous citer tout à la fois la guerre de sécession américaine où, quatre ans durant (1861-1864), nordistes et sudistes se sont battus comme des enragés, où bien encore la Commune de Paris de 1871 où versaillais et parisiens se sont livrés aux combats sanglants que l’on sait. Avant de conclure : « Ca, ce sont des guerres civiles » ! Quand le même François Fillon, au coeur d’une tourmente judiciaire, parle d’« assassinat politique », les juristes appelés à la rescousse brandissent le code pénal pour nous rappeler qu’un assassinat est un homicide volontaire avec préméditation. Dont acte ! Pauvre François – décidément il n’en rate pas une !- qui, à la question d’un journaliste sur l’émoi que pouvait soulever le Penelopegate dans l’opinion publique, et, ayant pour toute réponse : « Je ne suis pas autiste tout de même », s’attire dans la minute les foudres des associations de parents d’autistes, SOS autisme en tête.
Si nous pensons qu’il faut être rigoureux avec les mots, nous pensons aussi qu’il ne faut pas les prendre toujours au pied de la lettre. Parce que les mots ont plusieurs sens : un sens premier, dit étymologique, et des sens dérivés, il faut considérer le contexte de leur énoncé pour découvrir le sens que le locuteur leur donne. Considérons le mot « autisme ». François Fillon qui n’a pas la réputation d’être un homme irrespectueux ne l’a évidemment pas utilisé dans son sens premier, médical, mais dans son sens plus ordinaire. Il a tout simplement voulu dire qu’il n’était pas coupé des réalités, n’était pas sourds aux interrogations des Français sur sa situation. J’appartiens, moi, à un temps et à une époque où, pour qualifier une personne « attardée » mentale ou physiquement disgracieuse, l’on employait le terme « mongolien », sans s’attirer la protestation des associations de défense des trisomiques 21 comme on les appelle aujourd’hui.
Que François Fillon soit maladroit dans son expression orale, chacun peut en convenir, de là à déclencher les indignations vertueuses des uns et des autres, il y a une exagération que l’on pourrait s’éviter. S’agissant du mot « assassinat politique », c’est naturellement dans son sens figuré que monsieur Fillon l’a entendu, étant en ceci fidèle au Dictionnaire Larousse faisant de l’assassinat, je cite encore : « une action provoquant la disparition, l’anéantissement de quelque chose », et donnant pour exemple « l’assassinat des libertés ». Il est certain que si François avait évoqué à propos de ses ennuis une volonté d’ « élimination politique » il n’eût déclenché aucun tollé … Et pourtant une élimination, c’est aussi une mise à mort, non ? Quant à l’expression exacte employée par le candidat à l’élection présidentielle : « climat de quasi guerre civile », cette expression bien entendue, c’est-à-dire correctement comprise, elle n’eût du donner lieu à aucune mauvaise interprétation. Les premiers termes ici, paradoxalement, sont les plus importants. « Climat », tout d’abord qui exprime une ambiance, en l’occurrence délétère, pas une situation concrète de lutte armée. « Quasi » ensuite qui veut dire un « approchement » d’une situation, mais pas la situation elle-même. Pour qu’il n’y ait définitivement aucune ambiguïté sur le sens donné à son propos par M. Fillon, nous aurions peut-être glissé le mot « froide » entre « guerre » et « civile », ce qui aurait donné au final : « guerre froide civile », expression sans doute plus juste pour qualifier à la fois les tensions actuelles entre institutions (politiques) et les citoyens, et les tensions entre générations elles-mêmes.

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