Crédit social chinois : miroir pour l’Occident
Grâce à ses millions de caméras intelligentes, le régime chinois serait en passe de généraliser le « crédit social », système qui récompense ou pénalise les habitants selon leur niveau de vertu. L’Europe serait elle à l’abri d’un « crédit social » ?
Le crédit social chinois face covid-19
La crise sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19 a eu des conséquences profondes sur la société et l’économie chinoises. Entre arrêt de la production, confinement généralisé, mobilisation de l’ensemble des acteurs, le gouvernement a été confronté à une crise sanitaire sans précédent. L’Etat-parti a été en mesure de mettre en œuvre des mesures fortes grâce un ensemble de facteurs, dont son maillage territorial. Les millions d’agents de sécurité des quartiers et de membres des comités locaux du Parti ont joué un rôle clé, notamment pour faire respecter le confinement. Si une grande attention a été portée aux outils technologiques comme les « QR codes santé » développés par Alibaba ou Tencent, peu d’attention a été accordée au rôle joué par le système de crédit social.
Un outil de surveillance
Le « système de crédit social est devenu, dans l’imaginaire collectif, un des exemples de l’autoritarisme « orwellien » chinois, un système qui attribuerait une note à chaque citoyen en fonction de son comportement. En réalité, c’est un système bureaucratique mais fragmenté, loin d’un « système de notation universel » fantaisiste. Le système de crédit social est un outil de gouvernance utilisé pour renforcer le pouvoir administratif des administrations locales, et ce, notamment, dans la gestion de la crise sanitaire.
Décrit dans les directives comme un « système de crédit et de sanctions selon lequel tout devient limité, une fois que la confiance est perdue », le crédit social s’applique aux personnes morales, dotées depuis janvier 2018 d’un numéro de crédit social, et aux personnes physiques – qui restent identifiées par leur numéro de carte d’identité, dont la puce électronique est capable de stocker de multiples données.
Les collectivités locales à travers la Chine mettent en place leur propre système de notation « civique ». Tandis que la Cour suprême et d’autres administrations émettent des listes noires de contrevenants, de personnes inculpées qui se soustraient à une décision de justice ou de débiteurs défaillants. Ils sont soumis à des restrictions partielles ou totales sur certaines dépenses comme l’achat de billets d’avion et de train.
Comment cela fonctionne-t-il pour les citoyens ?
En France, nous avons par exemple l’habitude du permis à points pour la conduite. Grillez un feu rouge, vous perdrez quatre points (si vous vous êtes fait prendre). Soyez sages pendant plus de six mois, ou payez pour un stage, et vous récupérerez des points. Si vous êtes chauffeur de taxi, propriétaires de maisons d’hôtes ou simplement commerçants sur Internet, le système de notation vous est aussi familier. Soyez aimables, et les clients vous remercieront en vous notant correctement, ce qui vous donnera meilleure réputation. Si en revanche vous faites mauvaise impression pour telle ou telle raison, vous serez mal noté, et Dieu sait à quel point les notes influencent l’opinion publique.
Maintenant, imaginez que ces systèmes soient étendus à tous les aspects de notre vie quotidienne. C’est difficile, mais c’est réel. Comme dans un jeu vidéo, votre score ne cesserait de varier en fonction de vos actions.