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D. Trump investi, cohérence du Royaume-Uni, de la BCE et de la Chine

La Chine a rempli son objectif de croissance en 2016 au prix d’un endettement accru. L’attention est maintenant portée sur D. Trump et l’orientation qu’il souhaite donner aux relations commerciales sino-américaines. Le risque d’une perte du passeport financier européen pour les institutions britanniques s’accroît tandis que la remontée de l’inflation ne fera pas changer le cap de la BCE.

Aux Etats-Unis, les attentes du discours d’investiture de D. Trump étaient élevées, tout comme la déception de certains investisseurs suite à la cérémonie. La légère dépréciation du dollar et la baisse des rendements souverains à 10 ans ont d’ailleurs illustré cette déception. Si le discours du président fut peu informatif en termes de mesures qu’il priorise ou qu’il souhaite appliquer rapidement, D. Trump semble cependant avoir gardé la même ligne directrice depuis son élection le 8 novembre 2016. Il est apparu combatif et a renforcé la probabilité d’application de son programme en réaffirmant notamment que toutes ses actions seraient réalisées en faveur de la croissance et des emplois américains.

Ces dernières semaines, deux autres éléments ont accru la probabilité d’application du programme :

  • Les nominations au sein du cabinet de D. Trump sont cohérentes avec les positions présentées lors de sa campagne électorale. Les affectations aux postes clefs de l’administration Trump alimentent notamment les espoirs des Américains en matière de dérégulation des industries financière et pétrolière, de limitation de l’immigration illégale ou encore de création d’emplois dans l’industrie américaine. En revanche, seuls deux responsables nommés par D. Trump sont confirmés par le Sénat au premier jour de sa présidence, contre 7 lors du premier jour de B. Obama : J. Mattis au poste de Secrétaire à la Défense et J. Kelly au poste de Secrétaire à la Sécurité intérieure. Ils ont en effet suscité le moins de contestation au sein du comité sénatorial jusqu’à présent.
  • La signature du premier décret présidentiel contre l’Obamacare renforce également le message du président. Si ce décret n’abroge pas la loi sur l’assurance-maladie, il lui donne tout de même de la souplesse et confère le droit aux agences fédérales d’accorder davantage d’exemptions et de dérogations à l’Obamacare. Ce décret sera peut-être plus symbolique qu’efficace dans les faits mais il illustre la détermination de D. Trump à agir rapidement et de manière pragmatique. Sa future rencontre avec le président mexicain et le premier ministre canadien pour renégocier l’accord de libre-échange nord-américain s’inscrit dans cette même logique de pragmatisme.

 

En ce qui concerne les attentes des investisseurs, celles-ci nous paraissent encore trop élevées, ce qui pourrait renforcer les récents mouvements baissiers sur le dollar et sur les taux à court terme. Nos anticipations d’accélération de la croissance sont en effet plus modérées que celles du consensus : D’une part, malgré sa récente dépréciation, l’appréciation du dollar depuis l’été 2016 pourrait limiter les exportations américaines au premier semestre. D’autre part, la hausse des taux pourrait quant à elle limiter une accélération trop importante de l’investissement résidentiel en début d’année.

En Chine, la croissance du PIB pour le dernier trimestre de 2016 a atteint 6.8%, l’année enregistrant une croissance de 6.7%, en ligne avec l’objectif-cible. Cette légère accélération découle des stimuli budgétaires initiés par Pékin, lesquels contribuent au renforcement des déséquilibres économiques du pays. Le recours massif au crédit a ainsi poussé l’endettement à 264% du PIB alors qu’il s’établissait à 247% fin 2015. L’attention est désormais tournée vers les Etats-Unis où D. Trump devrait préciser l’orientation qu’il donnera aux relations commerciales sino-américaines. Un ton protectionniste américain dur instaurerait un climat d’incertitude élevé dans lequel il serait plus malaisé pour la Chine de résoudre ses déséquilibres internes. Bien que la dépendance chinoise aux exports se soit réduite – passant de 37% du PIB en 2006 à 22% en 2015 – le vecteur du commerce international demeure important pour la Chine et un choc sur celui-ci – via l’imposition de barrières tarifaires ou d’un régime de taxation américain défavorable (cf. le border adjustment tax) – est de nature à envoyer la croissance sous l’objectif-cible du gouvernement. Ce scénario entrainerait des ripostes commerciales de la Chine, la plus drastique étant une dévaluation du yuan.

Au Royaume-Uni, le Premier Ministre T. May a clarifié les priorités du gouvernement dans le cadre de la sortie du pays de l’Union Européenne (UE). Elle a indiqué que son principal objectif était de rétablir le contrôle des frontières avec l’UE et que le Royaume-Uni ne dépende plus de la Cour Européenne de Justice. En conséquence, elle a reconnu qu’il ne pourrait plus être membre du marché unique européen après sa sortie de l’UE. En outre, il pourrait également quitter l’union douanière pour être en mesure d’établir de nouveaux accords commerciaux avec les pays n’appartenant pas à l’UE.

Ainsi, T. May a confirmé l’orientation qu’elle avait donnée en octobre dernier. Même si elle a voulu assouplir sa communication en se disant favorable à une période de transition et en indiquant que le résultat des négociations avec l’UE serait soumis au Parlement britannique, il n’en reste pas moins que la direction adoptée par le gouvernement est celle d’une sortie « dure » avec peu de négociation avec l’UE.

 

Analyse et implications:

  • T. May a indiqué qu’elle souhaitait de nouveaux accords de libre-échange avec l’UE. Mais cela ne pourra pas être possible sans l’accord des pays européens. Ainsi, compte tenu de la sortie du Royaume-Uni du marché unique, le risque d’une perte du passeport financier européen pour les institutions britanniques et d’une relocalisation des chambres de compensation en zone euro, que nous anticipions, est accru.
  • Le prochain évènement clé sera, ce 24 janvier, la décision rendue par la Cour suprême sur la nécessité pour le gouvernement de disposer de l’aval du parlement pour activer l’article 50 du traité de Lisbonne. Si une consultation devait avoir lieu, T. May pourrait ne pas être en mesure d’amorcer la phase de négociations dès mars 2017 comme elle l’avait annoncé.
  • Nous continuons de prévoir que l’incertitude liée aux conditions de sortie du Royaume-Uni affaiblira davantage la livre sterling au cours des prochains mois. Nous maintenons notre prévision d’un cours livre/dollar à USD 1.15 fin 2017.

 

En zone euro, comme nous l’anticipions, la Banque Centrale Européenne n’a pas apporté de modification à sa politique monétaire le 19 janvier. Lors de sa conférence de presse, M. Draghi a, en premier lieu, assuré que la remontée de l’inflation en zone euro (en glissement annuel, elle est passée de 0.6% à 1.1% en décembre) ne remettait pas en cause l’orientation de la politique monétaire et il a insisté sur le fait qu’il n’y avait pas de « tendance haussière convaincante » sur l’inflation sous-jacente (qui était à 0.9% en décembre). En outre, il a souhaité confirmer qu’il n’y avait pas de dissension forte au sein du Conseil des gouverneurs en indiquant qu’ils considéraient à l’unanimité que la décision de prolonger l’assouplissement quantitatif prise en décembre dernier avait été adéquate. Enfin, il s’est félicité que cette décision ait « permis de préserver les conditions de financement très favorables ».

 

Analyse et implications :

  • L’insistance de M. Draghi quant au bas niveau de l’inflation sous-jacente devrait limiter les pressions haussières sur les rendements de la zone euro car elle confirme que la BCE n’entend pas réduire le rythme de son programme d’achat en deçà de EUR 60 milliards par mois entre avril et décembre 2017, même si l’inflation totale en zone euro poursuit sa hausse. Nous maintenons notre prévision d’une poursuite de son programme d’achats d’actifs tout au long de 2017. Un ralentissement des achats pourrait intervenir, selon nous, en 2018.
  • En indiquant que la décision de décembre avait permis de préserver des conditions financières favorables, M. Draghi a montré qu’un objectif de la BCE était de déconnecter l’évolution des rendements européens des rendements américains. Nous maintenons notre prévision d’un rendement Bund à 10 ans en moyenne à 0.34% en 2017.

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