Et si la Russie réussit en Ukraine Par Charles Michel
L’Ukraine est une scène de crime. L’auteur de ce crime est parmi nous, dans cette salle. Vous savez qui vous êtes.
Le Kremlin rêve de restaurer l’ancien empire russe. Après l’Ukraine, à qui viendra le tour ? À qui viendra le tour de satisfaire le fantasme d’un autre âge de Poutine ? Et si la Russie réussit en Ukraine, quels autres pays seraient tentés de reproduire ses actes ?
Sur cette scène de crime, il y a également la victime, qui a été attaquée. L’Ukraine avec tous les Ukrainiens et toutes les Ukrainiennes, qui se livrent à une bataille qu’ils n’ont pas déclenchée, qui défendent leur pays confronté à une guerre qu’ils n’ont pas voulue et qui protègent leurs enfants contre des souffrances que personne ne mérite, en essayant de les préserver d’une autre horreur de cette guerre : les enlèvements forcés en direction de la Russie, de prétendues « adoptions ». En réalité, il s’agit de déportations d’enfants.
Je vous le demande à tous, y compris aux représentants et représentantes de la Russie : pourriez-vous supporter que l’on vous vole votre enfant et qu’il soit déporté ? Que votre enfant soit contraint d’oublier votre famille, votre langue, votre pays ? Une prétendue « rééducation »! Il s’agit en fait d’une tentative de génocide culturel.
En défendant leurs enfants, les Ukrainiens et les Ukrainiennes défendent ce qu’il y a de plus précieux : leurs familles, leur avenir, leur liberté. C’est la raison pour laquelle nous, l’Union européenne, nous tenons résolument aux côtés de l’Ukraine afin qu’elle se défende. Tant que les innocents seront attaqués, nous les aiderons à se défendre. Et nous nous tiendrons à leurs côtés aussi longtemps qu’il le faudra.
Sur cette scène de crime, il y a également les témoins, nous tous partout dans le monde. Et nous tous, les témoins, sommes là, au Conseil de sécurité. Que faisons-nous face à ce crime ? Que faisons-nous face à cette agression ? Que faisons-nous alors que l’un des membres permanents attaque son voisin ? Que faisons-nous, alors qu’il se sert de son droit de veto contre chacun et chacune d’entre nous, et contre les principes fondamentaux de la charte des Nations unies ?
Ne sommes-nous pas réunis dans cette enceinte pour une seule et unique raison? Pour protéger la paix et la sécurité de tous, quel que soit leur pays ou leur continent.
Charles Michel
Président du Conseil européen
Des nations puissantes et responsables ne peuvent tout simplement pas fermer les yeux face à ces crimes, car nous partageons tous une responsabilité. Une responsabilité de mettre fin à la guerre et une responsabilité d’œuvrer en faveur de la paix. Une paix juste qui respecte la charte des Nations unies et ses principes fondamentaux, l’intégrité territoriale de chaque nation souveraine. Une paix juste qui ne pourra pas durer si des crimes restent impunis.
C’est pourquoi je souhaiterais m’adresser directement à chacun et chacune d’entre vous autour de cette table. En tant que nations responsables, nous avons tous un rôle à jouer dans la construction de la paix et de la stabilité mondiales. Je voudrais tout particulièrement m’adresser à l’éminent représentant chinois. Vous avez mis en garde la Russie contre le recours à l’arme nucléaire, ce que nous saluons. Nous vous demandons maintenant d’aller plus loin. Unissons nos forces pour persuader la Russie de mettre un terme à cette guerre criminelle qui nuit à tant de personnes. Unissons nos forces pour convaincre la Russie de respecter les principes de la charte des Nations unies.
Les conséquences de ce crime s’étendent partout dans le monde et les derniers actes cyniques du Kremlin ne font qu’aggraver les choses. Avec le retrait de l’initiative céréalière de la mer Noire, par exemple. Lorsque vous tirez des missiles sur des silos à grain à Odessa, ils atteignent également l’Afrique et tuent les plus vulnérables, détruisant la vie de millions de personnes.
Un crime tragique se déroule sous nos yeux. Et nous sommes tous témoins. Tous! Il faut que nous nous tenions résolument au côté des agressés, surtout ici, au Conseil de sécurité. C’est pour cela que cette enceinte a vu le jour et c’est pour cela que nous sommes là aujourd’hui: pour dire « non » à l’agression. Pour protéger la paix, la sécurité et la coopération, entre les personnes et entre toutes nos nations.
Je vous remercie.