Éthiopie : découvrez la tribu des Suri
Tumu est si loin, si mystérieux : ni chants, ni invocations, ni prières ne lui sont adressés. On ne peut le connaître qu’après la mort, qui est la fin de toutes choses. Pas plus l’islam que le christianisme n’ont de prise sur la vision pragmatique qu’ont de l’existence les Surma. Les ancêtres eux-mêmes restent indifférents au sort des hommes, aussi, si ces derniers se souviennent de leurs entreprises glorieuses, ils ne les vénèrent pas puisqu’ils savent qu’ils doivent se débrouiller seuls chaque jour de leur vie.
Indifférents à toute religion, sans pouvoir politique organisé, ils vivent en autarcie, isolés dans leurs montagnes sauvages couvertes de forêts et de savanes.
La beauté physique est de première importance
Tous prennent grand soin de leur aspect extérieur, accordant une place de choix aux peintures corporelles.
Encouragés dès leur plus jeune âge à imiter les adultes, les enfants Surma s’enduisent le corps et le visage de pâtes calcaires diversement pigmentées suivant la roche utilisée, selon des contours d’une extrême fantaisie. Certains motifs font allusion à la nature ou aux animaux : robes des vaches, faciès des singes colobes, pelage des prédateurs… Lorsque plusieurs personnes se peignent de façon identique, cela signifie qu’ils sont liés familialement ou d’amitié. Ces décorations répondent à un code social bien établi, et il existe diverses façons de se peindre selon le but recherché : séduction ou peintures de guerre devant effrayer l’ennemi. La coiffure est un autre élément prépondérant dans la fierté des guerriers Surma. Ils se rasent le crâne avec des lames de rasoir en laissant quelques lignes décoratives.
La largeur du labret donne une estimation de la dot dont aura à s’acquitter tout prétendant. La dot peut représenter jusqu’à une soixantaine de bêtes. Les labrets en bois peuvent être de forme trapézoïdale ou demi-sphérique, tandis que ceux en argile seront généralement ronds. En âge de se marier, la jeune Surma, après s’être fait percer sa lèvre et extraire des dents de la mâchoire inférieure, mettra tout en œuvre pour distendre cet orifice en y insérant des labrets successifs, de taille toujours croissante. En général, toutes les filles d’une classe d’âge se font inciser en même temps, et lorsque la coupure est pratiquée à cicatrisée, le village célèbre cet événement par une fête nommée Zigroo. On y boit le bordray, sorte de boisson fermentée à base de farines de sorgho et de maïs blanc.
Pour les hommes, il est d’usage de procéder à des scarifications sur le torse, le ventre ou les bras, afin de rendre un éloge à leur bravoure. Les cicatrices survenant lors de combats aux bâtons, les Donga, laissent des marques indélébiles relatant les haut faits et le courage démontré.
Le goût des parures s’exacerbe à l’occasion des festivités données lors des récoltes, à la fin de la saison des pluies. C’est la saison de repos consacrée à la séduction et aux mariages. Les hommes y font assaut de force et de virilité, s’affrontent à la perche en duels acharnés sous l’œil des jeunes filles qui, parmi eux, choisissent leur mari.
Les Surma ont été contraints à cultiver la terre mais ils se déclarent fièrement pasteurs. En effet une épidémie de charbon, dans les années soixante-dix, anéantit d’un seul coup tous leurs troupeaux, les réduisant à la misère. S’ils furent obligés de cultiver du sorgho et du maïs pour survivre, ils ne changèrent en rien leur système de valeurs, et continuèrent à considérer les bovins comme symbole de richesse, de noblesse et de statut social.