
France : de plus en plus de Français choisissent les retraites spirituelles pour leurs congés
De plus en plus de vacanciers choisissent des séjours dans des communautés religieuses, en quête de silence, de repos ou de spiritualité.

Ils sont cadres, enseignants, étudiants, parfois retraités. Et plutôt que de réserver un billet d’avion ou une location en bord de mer, ils choisissent de passer quelques jours – parfois une semaine – dans un monastère ou une abbaye. Un choix singulier, mais de moins en moins marginal : les retraites spirituelles proposées par les communautés religieuses françaises attirent chaque année davantage de participants.

Une recherche de déconnexion
À l’origine de cette tendance, un besoin de rupture avec le rythme effréné du quotidien. Vie professionnelle sous tension, usage intensif des écrans, surcharge mentale : nombreux sont ceux qui aspirent à ralentir. Pour certains, la retraite spirituelle apparaît comme une réponse à cette fatigue généralisée.
« Ce que je cherchais, c’était le silence, le calme, et surtout le fait de n’avoir aucune obligation », témoigne Claire, venue passer cinq jours dans une abbaye bénédictine en Bourgogne. « On se lève tôt, on mange simplement, on écoute les offices… C’est une autre façon de vivre le temps. »
Une expérience intérieure marquante
Pour d’autres, ce besoin de recentrage s’inscrit dans une démarche plus large, parfois amorcée bien en amont. Cédric Leboussi, auteur des Petites clefs du bonheur, un ouvrage qui accompagne de nombreux pèlerins en France, a lui-même parcouru le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle. Une expérience fondatrice.
« Ce pèlerinage a été un tournant. Marcher seul pendant des semaines, avec pour seule compagnie ses pensées et le bruit de ses pas, m’a appris à écouter ce que je fuyais jusque-là. Depuis, je fais régulièrement des retraites en abbaye. Ce sont des respirations indispensables dans ma vie. »

Des communautés ouvertes à tous
Les retraites proposées par les communautés religieuses – bénédictines, cisterciennes, carmélites ou œcuméniques – sont généralement ouvertes à toute personne majeure, sans exigence de foi. L’hébergement est modeste, les repas simples, et chacun est libre de participer aux prières, aux temps de silence ou aux tâches du quotidien.
« L’accueil fait partie de notre vocation », explique Frère Jean, moine à l’abbaye de Ligugé (Vienne). « Beaucoup de ceux qui viennent ne sont pas croyants, mais tous partagent le besoin de se poser, de se recentrer. »
Un phénomène en progression
Difficile de quantifier précisément ce phénomène, tant les retraites spirituelles restent majoritairement gérées de manière autonome par chaque lieu. Toutefois, plusieurs communautés signalent une hausse régulière des demandes, notamment depuis la crise sanitaire.
Des plateformes en ligne, comme Retraites-spirituelles.com ou Monastic Guesthouses, facilitent désormais les démarches pour réserver un séjour, contribuant à structurer cette forme de tourisme intérieur.
Une quête de sens plus large
Au-delà du simple besoin de repos, ces retraites s’inscrivent dans une recherche de sens plus large. Elles séduisent une population en questionnement, attirée par la sobriété et la dimension spirituelle, même sans adhésion religieuse.
« Nous vivons dans une société de performance, de vitesse. Ces séjours offrent un espace pour respirer autrement, parfois pour redéfinir ses priorités », analyse le sociologue Jean-François Barbier-Bouvet, spécialiste du fait religieux contemporain.
Un tourisme alternatif
Avec plus de 2 000 lieux de vie religieuse recensés en France, les possibilités sont nombreuses, souvent dans des cadres naturels préservés et à des tarifs abordables. Pour les communautés, ces retraites représentent aussi un moyen de maintenir le lien avec la société et de faire vivre des lieux patrimoniaux parfois fragilisés.
Si cette pratique demeure encore discrète, elle pourrait bien préfigurer une autre manière de voyager : plus sobre, plus intérieure, et en phase avec une époque en quête de lenteur.