Guy-André Pelouze: « Le monopole de l’assurance maladie est un danger »
La santé des Français est un sujet capital qui est bien différent de celui des soins nécessaires pour traiter les maladies. Nous avons, grâce à notre mode de vie, des indicateurs de santé qui sont parmi les meilleurs au monde même s’ils se détériorent en raison de la prévalence des maladies non transmissibles (cancers, maladies cardio-vasculaires, neurodégénérescences, obésité et diabète de type2). Pour autant, la santé peut aussi être sévèrement compromise par des catastrophes naturelles, il ne faut pas l’oublier. Les épidémies, la contamination des eaux, un accident nucléaire ou une activité volcanique intense peuvent avoir des conséquences locales et planétaires pour lesquelles l’état régalien doit être prêt. Le dispositif actuel centre autour de Santé Publique France et des ARS est totalement inadapté : beaucoup de bureaucratie, peu d’efficacité. Les régions doivent être chargées de la mission de santé aux populations.
Cependant, le système de soins totalement administré par l’Etat est un symbole d’une dérive qui a conduit à une détérioration des soins en France depuis 40 ans, dans le secteur ambulatoire ou hospitalier. C’est un fait corroboré par les difficultés à consulter et les délais pour l’imagerie ou les traitements. Cette détérioration concerne les maladies sérieuses alors que l’utilisation du système pour des problèmes passagers ou bien pour convenance continue de progresser. Depuis 10 ans, une pénurie se fait même jour dans différents secteurs.
Les Français ressentent cette détérioration et les comparaisons internationales la mesure. Depuis des décennies toutes les tentatives de réformes du système actuel ont échoué faute d’avoir créé les conditions organisationnelles et économiques du changement. En effet, ce système a été mis en œuvre dans un temps révolu, celui de l’après-guerre et de la « médecine de recours ». L’accès au système de soins était alors dicté par un impératif lié à une situation sérieuse. Les pathologies étaient dominées par les maladies infectieuses et les complications des maladies non-transmissibles. Depuis, des changements profonds se sont produits.
Ainsi, la société d’abondance, une espérance de vie de plus de 80 ans en moyenne, une médecine de consommation et l’explosion des maladies non-transmissibles représentent des changements tels que ce modèle n’a pu s’adapter. De surcroît, plus récemment, la mutation de la médecine, devenue une biologie évolutive rythmée par l’innovation, l’imagerie, la génétique, les thérapies cellulaires, est en train d’aggraver l’inadaptation de notre système de soins.
Par Guy André Pelouze, chirurgien des hôpitaux.