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Le Gabon est un pays francophone en Afrique et il faut aussi rétablir le balancier. Je suis issue de la langue française, je pense que l’Afrique représentera bientôt près d’un milliard d’individus et il ne faut pas que dès que l’on pense affaire ou économie, on soit systématiquement dans un pays anglo-saxon.

RICHARD ATTIAS : « Le New York Forum Africa n’est pas une plateforme d’idées, ni de solutions, mais une plateforme d’affaires »

 

La 3e édition du New York Forum Africa (NYFA) s’est tenue du 23 au 25 mai à Libreville, la capitale du Gabon. Richard Attias de Richard Attias & Associates, fondateur et organisateur de ce Forum, revient sur ces trois jours de dialogues et sur l’essence même de cette rencontre internationale placée sous le thème central de «la Transformation du continent» où plus de 1500 personnes ont participé.

 

Quels ont été les thèmes abordés lors de la 3e édition du New York Forum Africa (NYFA) ?

Énormément de thèmes ont été abordés, mais ils viennent tous s’inscrire dans un thème principal qui est comment accompagner la transformation du continent. Ce mot est un mot que l’on utilise beaucoup en ce moment, mais pour être tout à fait concret, la question est de savoir comment on va transformer les investissements en emploi et en industrie ; comment on va transformer les ressources naturelles pour qu’elles soient véritablement transformée localement sur le continent avant d’être exportées ; comment on va transformer les jeunes non en demandeurs d’emploi mais en personnes ayant vraiment des emplois ; comment on va transformer des terres arables en véritable agro-industrie pour répondre à des problèmes de sécurité alimentaire, etc. Donc on essaie ici d’être extrêmement concret et les débats vont dans ce sens. Ils évoquent à la fois les opportunités, mais aussi les contraintes et les difficultés que les pays africains comme le Gabon ou bien d’autres rencontrent. Et puis, chacun y va de son analyse et de ses conseils. C’est ainsi que l’on a et que l’on écoute des experts sud-américains avec des anciens chefs d’Etat sud-américains, des expériences asiatiques et panafricaines.

Ce Forum est présenté comme étant résolument tourné vers l’action. Quelles sont aujourd’hui les solutions mises en place depuis l’année dernière par exemple ? Y a-t-il eu des changements, des évolutions concrètes ?

Le Forum est par définition un Forum. Ce n’est donc pas un gouvernement qui prend des mesures. Il ne faut pas attendre des conférences, quelle qu’elles soient, qu’elles résolvent les problèmes de la planète, pas plus le New York Forum Africa qu’un autre forum. C’est avant tout une plateforme qui sert de catalyseur et où toutes les personnes intelligentes et de bonne volonté se retrouvent, évoquent ensemble des solutions qu’elles vont ensuite déployer et implémenter dans leur pays. Il y a effectivement toute une série d’idées qui ont été formulées. On a démarré la première édition du NYFA en faisant signer devant les chefs d’Etat et les personnalités publiques qui les représentaient quatre grandes conventions qui ont été amorcées il y a un an. Ça n’est pas une plateforme d’idées, ni de solutions. C’est une plateforme d’affaires. Et je donnerai quatre exemples très rapides. La France, au travers de l’Alliance française pour le Développement (AFD), en présence de Laurent Fabius a signé avec le Gabon un énorme projet dans lequel l’AFD finance à hauteur de 200 millions d’Euros la remise en l’état des projets d’urbanisation et de réaménagement des sols de Libreville et de sa banlieue. Ensuite, le deuxième projet concret signé concerne la Corée au travers d’un de ses géants, Samsung, qui va investir à Port-Gentil et construire une des plus grandes raffineries de la région. Troisième projet : le Royaume du Maroc qui avait entamé des réflexions l’année dernière à travers l’opérateur Microsoft et la grande agence marocaine pour l’Emploi a signé un projet qui consiste à labelliser et former un grand nombre de jeunes entrepreneurs gabonais pour travailler dans les métiers de la technologie. Enfin, la Banque africaine de développement avait entamé l’année dernière une réflexion qui s’est transformée cette fois-ci en un projet financé à hauteur de 900.000 euros pour créer un incubateur pour de jeunes entrepreneurs au Gabon. On ne peut pas faire plus concret !

Pourquoi avoir tenu à ouvrir le NYFA à l’intention des jeunes, qu’ils soient étudiants ou entrepreneurs ? Quel message vouliez-vous faire passer ?

Je ne cherche à faire passer aucun message. Je suis toujours notre plan d’action et la mission de notre fondation. Certes, le NYFA est un forum qui se tient au Gabon, qui est organisé avec les autorités gabonaises mais il s’inscrit dans l’ADN et dans la mission du New York Forum Institute, créé il y a déjà cinq ans aux Etats-Unis. La mission de notre fondation est de tout faire pour aider à la création d’emplois, parce que l’économie est un parent malade. Si nous ne créons pas d’emplois pour les jeunes et si nous n’avons pas d’espoir, c’est une bombe sociale et on sait quels sont les dégâts qu’elle peut provoquer, tel qu’un déséquilibre mondial. Il était donc fondamental que nous invitions des jeunes. L’année dernière déjà, bon nombre de jeunes avaient déjà participé au NYFA. Cette année, nous sommes allés encore plus loin. Nous leur avons dédié un forum. C’est le premier. Nous avons voulu l’anticiper par une enquête en ligne à l’échelle panafricaine où 5.000 jeunes de moins de 26 ans ont répondu pour nous faire part de leurs inspirations, de leurs souhaits, de leurs craintes, de la manière dont ils aspiraient à travailler et dans quels domaines ils voulaient travailler. Ça a servi de base à ces cinq heures de débat qui se sont tenues vendredi. On y a récolté un très grand nombre d’idées et de propositions venant des jeunes, parce qu’il faut les écouter et les entendre, parce qu’il faut leur faire comprendre qu’on les a entendus. Il a fallu aussi les inspirer. C’est ainsi que le président Ali Bongo du Gabon, le président Paul Kagamé du Rwanda et la présidente Catherine Samba-Panza de la Centrafrique sont venus dialoguer avec eux sans tabou, sans censure, en totale transparence. De grandes personnalités comme le chanteur Youssou Ndour, le grand basketteur congolais  Dikembe Mutombo  ancien joueur de la NBA, Jeff Martin le père fondateur d’iTunes, bras droit de Steeve Jobs sont venus leur parler et leur expliquer comment la technologie, le sport, la culture pouvaient aussi être des canaux d’épanouissements et d’emplois.

Y aura-t-il une quatrième édition ? Et si oui, où se tiendra-t-elle ?

Il y aura une quatrième édition. Où se passera-t-elle ? Il appartient aux autorités gabonaises de le décider après le New York Forum Africa 2014. Pour le moment déjà, essayons de bien réussir la troisième édition et on verra pour l’année prochaine. En tout cas, le NYFA n’est pas appelé à être ponctuel.

 

Et pourquoi ne pas changer de pays ? Pourquoi rester au Gabon ?

Il y a des pays où je n’ai aucune raison d’aller pour des raisons très simples : il y a déjà suffisamment d’attentions et d’investissements qui vont par exemple au Nigéria, à l’Afrique du Sud. J’étais même l’un des tous premiers organisateurs de forums en Afrique du Sud en 1995 puisque j’ai collaboré à créer par exemple le Forum de Durban avec le World Economic Forum.

Ensuite, pourquoi pas le Gabon ? C’est un pays stable, où les autorités ont été extrêmement accueillantes et ont contribué à l’aspect tant intellectuel qu’économique du Forum. Il est un exemple de ces pays à économie émergente. Toutes les conditions sont réunies pour avoir des débats et des réflexions intéressantes. Il est intéressant de créer une plateforme qui se situe entre le Maroc et l’Afrique du Sud. Le Gabon est un pays francophone en Afrique et il faut aussi rétablir le balancier. Je suis issue de la langue française, je pense que l’Afrique représentera bientôt près d’un milliard d’individus et il ne faut pas que dès que l’on pense affaire ou économie, on soit systématiquement dans un pays anglo-saxon.

Qu’avez-vous à répondre de la polémique financière liée à l’existence de ce Forum ?

N’est pas plus sourd que celui qui ne veut pas entendre et n’est pas moins objectif que celui qui ne veut pas l’être. Vos confrères ou quelques personnes qui ne cessent d’évoquer ce sujet ne veulent pas entendre la réponse. Je vais donc redonner la réponse qui a d’ailleurs été entérinée par la porte-parole du gouvernement dans une conférence de presse où beaucoup de médias ont tronqué l’essentiel de ce qui a été dit il y a une semaine. Je vais donc prendre le temps et je vous remercie d’avoir poser cette question. Le budget qui a été annoncé est très clair : il est de 5 millions d’euros. Ces 5 millions d’euros sont une partie infinitésimale dans une stratégie de communication et dans un projet d’investissement d’un pays. Comme le disait très justement la porte-parole du gouvernement, ça leur coûte infiniment plus cher, lorsqu’il s’agit de stratégie de promotion des investissements, d’aller aux quatre coins de la planète et parler de leur pays, faire des road show, des publireportages et parfois sans aucun retour. Alors que là, pendant trois jours, une fois par an, il y a une grande partie de la communauté internationale qui se réunit au Gabon. Deuxièmement, il y a des projets concrets qui se réalisent, donc le budget est largement amorti. Troisièmement, 80% de ce budget est dépensé dans le pays. Ça profite donc à tout le monde et ça crée une véritable industrie. Depuis trois ans, des entreprises de location de voitures, des mini-agences techniques, des sociétés de locations de plantes et de traiteurs se sont créées. Des hôtels sont en train d’envisager des rénovations parce que pratiquement un tiers du budget repart dans l’hôtellerie et la restauration. C’est donc un retour sur investissement très positif.

G.B

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