La France malade de sa fiscalité !
Avec 360 taxes et impôts, la France est médaille d’or de la complexité fiscale et du mille-feuille de taxes. Elle caracole en 2014 à plus de 45 % de taux de prélèvements obligatoires quand le Royaume-Uni est à 34 % et l’Allemagne à 38 %. Les entreprises tricolores acquittent des prélèvements beaucoup plus lourds que leurs homologues allemands ou britanniques. L’écart de fiscalité est de 200 milliards d’euros avec l’Allemagne et de 230 milliards d’euros avec le Royaume-Uni.
« L’art de l’imposition consiste à plumer l’oie pour obtenir le plus possible de plumes avant d’obtenir le moins possible de cris »
Ces propos, que l’on prête à Colbert, sont hélas toujours d’actualité. Avec 360 taxes et impôts divers, notre pays excelle dans la création de taxes, de surtaxes, de contributions, de redevances, de cotisations, de prélèvements presque autant que de jours dans l’année. Dans son livre « on va dans le mur » Agnès Verdier-Molinié directrice de la fondation Ifrap*- que l’on a bien souvent le plaisir de voir sur les plateaux de télévision, entre autre dans l’émission « C dans l’air », affirme que l’on peut baisser la fiscalité française de 100 milliards d’euros ! Une bouffée d’oxygène pour les ménages et les entreprises, mais comment s’y prendre ?
Voici quelques-unes de leurs propositions :
- Fonction publique: retour aux 39 heures
La fonction publique française compte en moyenne 700 000 agents de plus que les autres pays de l’UE. On compte 4,4 millions d’agents publics accomplissant leurs missions en 1 607 heures annuelles. En relevant le temps de travail hebdomadaire de 4 heures, soit 1 heure chaque année sur 4 ans et de ne pas remplacer les départs à la retraite, cette proposition permettrait d’économiser entre 3,7 et 15 milliards d’euros par an en matière de masse salariale.
- Décentraliser l’Éducation
37 000, c’est le nombre d’acteurs qui interviennent sur les questions d’éducation entre l’État, les régions, les départements et les communes. Ainsi, quand la France compte 220 000 personnels administratifs, l’Allemagne en compte 87 000 et le Royaume-Uni, 100 000. Une suradministration qui coûte cher: 14 milliards d’euros de dépenses annexes (restauration, transports, administration). Est-il vraiment nécessaire que l’État possède ses propres services au niveau des régions (Académies) et des départements (services académiques départementaux)?
Décentraliser l’Éducation, en donnant aux régions les compétences éducatives et en laissant les communes gérer tous les établissements scolaires de leur zone, permettrait une rationalisation du coût administratif de l’Éducation d’un minimum de 5 milliards d’euros et d’environ 100 000 agents publics.
- Culture: cesser toute subvention aux Frac
Les Frac, ces 23 Fonds régionaux d’art contemporain créés il y a tout juste trente ans, amoncellent 27 000 œuvres achetées grâce aux subventions des régions et de l’État, qui s’élevaient à 24 millions d’euros en 2010.
A force d’accumuler des œuvres sans les vendre, les Frac sont obligés de faire construire des super-réserves et des salles d’exposition temporaires ou permanentes. Quelques exemples: la construction du nouveau bâtiment coûte 17,8 millions d’euros pour le Frac Bretagne, 20 millions d’euros pour le Frac Provence-Alpes-Côte d’Azur et jusqu’à 52 millions d’euros pour le Frac Aquitaine.
Un budget conséquent pour des lieux très peu visités: entre 14 000 et 16 000 visiteurs par an. D’autant que cette muséification va à l’encontre de la mission originelle des Frac qui est de soutenir les artistes et de diffuser l’art contemporain à un public le plus large possible.
Il ne serait donc pas insensé de cesser toute subvention aux Frac. Leur budget pourrait être assuré par la vente annuelle de 10 % des collections et par le mécénat privé. Les Frac se recentreraient ainsi sur leur mission, à savoir faire connaître l’art contemporain au plus grand nombre. Avec, à la clef, une économie potentielle de 15 millions d’euros.
- Réduire le nombre de logements intermédiaires
Un ministre qui occupe un appartement de 120 m² pour un loyer moitié moins important que le prix du marché: ce type de scandale émaille régulièrement le secteur du logement social.
Il s’agit le plus souvent de logements intermédiaires (PLS, PLI, ILN), une frange de logements à la marge de la loi SRU ayant bénéficié de prêts ou d’aides à la construction. Pour ces logements gérés par des bailleurs sociaux les plafonds de ressources sont élevés (72 000 euros par an pour un jeune ménage en région parisienne pour un PLI).
La vente de 5 à 10 % de ces logements permettrait de récupérer 5 milliards d’euros (12 % du total des aides publiques au logement), pour désendetter les organismes HLM ou les autres propriétaires, tout en diminuant les frais de gestion. Les ventes doivent concerner en premier lieu les appartements occupés par ceux qui sont en situation de dépassement des plafonds.
- Réduire le nombre de parlementaires et le train de vie des Assemblées
539 millions d’euros. C’est le budget de l’Assemblée nationale (contre 338 millions pour The House of Commons et 451 millions pour le Bundestag), 875 millions d’euros par an au total avec le Sénat auxquels s’ajoutent les 154 millions de la réserve parlementaire. En trente ans, l’Assemblée a augmenté de 38 % le nombre de ses agents et est passée de 487 à 577 députés (équivalent à 112 000 hab./député, soit l’un des taux de représentativité les plus élevés).
Revenir à 487 députés permettrait d’économiser 14,6 millions d’euros. Réduire le coût de fonctionnement de notre système parlementaire est possible à condition de revenir sur l’opacité des financements que permet la multiplicité des primes et des indemnités diverses.
Si l’on payait les indemnités d’heures supplémentaires des séances de nuit aux seuls agents présents en séance, l’économie serait d’environ 32 millions par an à l’Assemblée nationale et de 20 millions environ pour le Sénat. Sans toucher au nombre de sénateurs, ces économies pourraient représenter un total de 66,6 millions d’euros par an.
- Mettre fin au monopole de SNCF Infrastructure
La SNCF est organisée en cinq divisions, dont Infrastructure qui réalise et entretient les voies et les signalisations du réseau ferroviaire public. Son chiffre d’affaires est de 5,5 milliards d’euros par an. Or, ce réseau n’est pas la propriété de la SNCF mais de l’entreprise Réseau ferré de France (RFF) dont la situation est ambiguë.
Pour entretenir ses infrastructures, RFF a l’obligation de faire appel à SNCF Infrastructure, et à elle seule. Le surcoût résultant de ce monopole est estimé à 25 %. «Dans l’infrastructure, on peut réaliser d’énormes gains de productivité en organisant mieux le travail. Certains parlent de coûts divisés par deux, déclare Claude Martinaud, ex-président de RFF. Mais ce sont les mêmes personnes qui font le diagnostic de ce qu’il faut faire et qui le font ensuite. Quand vous travaillez sur la ligne Béziers-Neussargues, vous n’allez pas dire qu’il n’y a rien à faire ; vous allez même dire le contraire pour justifier le maintien des effectifs.»
Économie réalisable: 1 milliard d’euros par an.
- Hôpitaux publics: convergence des tarifs
La liste des tarifs établie par la Caisse nationale d’assurance-maladie pour payer les établissements de soins comporte des milliers de lignes. Non sans raison.
Il existe un nombre considérable de pathologies. Une opération n’a pas le même prix si le patient est âgé de 30 ans ou de 80 ans. Le coût de l’opération varie à Paris ou dans une petite ville. Pour autant, est-il légitime qu’il existe deux listes de tarifs: une pour les hôpitaux publics et une pour les cliniques privées, avec des niveaux de tarifs généralement inférieurs de 20 % pour le privé?
Une prothèse de hanche techniquement peu complexe coûte 4 927 euros à l’hôpital public et 3 021 euros dans une clinique privée. Or, les missions spécifiques des hôpitaux publics – enseignement, recherche, urgences – ne peuvent être invoquées pour justifier ce deux poids deux mesures car elles sont financées par des budgets à part. En 2005, le gouvernement avait décidé d’une liste unique de tarifs en 2012, puis en 2018. La convergence avait débuté, mais elle a été stoppée… en 2013, au moment où la France en a le plus besoin pour réduire ses déficits.
Économie possible grâce à la convergence des tarifs: 5 milliards d’euros par an.
- Développer la chirurgie ambulatoire
La chirurgie ambulatoire a été rendue possible par les progrès de la chirurgie et de l’anesthésie. Cette innovation diminue le coût des traitements et la fréquence des maladies nosocomiales, tout en réduisant les perturbations liées au séjour hors de son domicile.
Or, en France, la proportion des opérations réalisées en ambulatoire est très inférieure à ce qu’on observe en Suède, au Danemark, au Royaume-Uni, en Allemagne ou aux États-Unis. Le retard est particulièrement important dans les hôpitaux publics. Sans doute parce que cette technique exige une restructuration des locaux et des équipes ainsi qu’une organisation minutieuse des soins. Le retard d’un seul examen ou d’un seul intervenant et la chirurgie ambulatoire devient impossible. Économie réalisable: 4 milliards d’euros par an.
- Agriculture: réduire la bureaucratie
En vingt ans, le nombre d’exploitations a baissé de moitié et la tendance se poursuit. Or, le nombre de fonctionnaires du ministère de l’Agriculture n’a baissé que de 9 % depuis 1980, sans compter les opérateurs de ce ministère dont les effectifs ont augmenté.
Outre les effectifs de l’enseignement agricole, le ministère de l’Agriculture compte actuellement 15 000 fonctionnaires. Ce nombre aurait dû diminuer de moitié pour évoluer comme le nombre d’exploitations, et de moitié encore grâce aux progrès de productivité rendus possibles par les nouvelles technologies.
Il faut simplifier le régime des subventions, supprimer la gestion des quotas, le contrôle des structures des exploitations, l’attribution des droits de produire et mettre un terme à l’administration du marché des terres agricoles. Quand on envoie un inspecteur vérifier que le nombre d’oliviers correspond à celui déclaré par l’agriculteur, il y a quelque chose qui ne marche pas.
Économie réalisable: 400 millions d’euros par an.
Quelques mesures qui apporteraient une bouffée d’oxygène aux entreprises et aux ménages assommés par une pression fiscale qui produit autant de taxes et d’impôts que nos 365 sortes de fromages !
*fondation pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques. http://www.ifrap.org/
Sources : le Figaro, Ifrap
G.F