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La Géorgie respecte la diversité, mais davantage d’efforts doivent être consentis pour faire accepter les minorités nationales et religieuses comme une partie intégrante et précieuse de la société

Strasbourg, 26.06.2024 – Dans l’ensemble, il règne en Géorgie un climat favorable à la protection des droits des minorités, mais les autorités devraient davantage promouvoir un climat de respect mutuel et de dialogue entre toutes les personnes au sein de la société, y compris par des efforts pour encourager la population en général à considérer et à accepter les membres des minorités nationales comme une partie intégrante et précieuse de la société géorgienne. Telles sont les principales conclusions du nouvel avis sur la Géorgie publié aujourd’hui par l’un des organes spécialisés du Conseil de l’Europe, le Comité consultatif de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales (voir le résumé de l’avis en géorgien ainsi que les commentaires du gouvernement).

Le Comité consultatif a constaté plusieurs évolutions positives au cours du quatrième cycle de suivi. Le mandat du Défenseur public a été considérablement renforcé : il est désormais habilité à exiger de particuliers qu’ils lui communiquent des informations, et à traiter les plaintes relatives aux procédures administratives. Les autorités ont dûment tenu compte de la recommandation du Comité consultatif concernant le montant du loyer des locaux du siège du Défenseur public et des efforts manifestes sont déployés pour mettre en œuvre la législation relative à la discrimination raciale. Des mesures spécifiques pour faciliter l’accès à l’éducation ont également été prises.

Toutefois, malgré ce tableau globalement positif et les circonstances difficiles dans lesquelles les autorités géorgiennes mettent en œuvre la Convention-cadre, le Comité consultatif appelle ces dernières à redoubler ses efforts d’intégration dans la société de toutes les minorités nationales grâce à des mesures concrètes de promotion de la confiance, du respect mutuel et de la compréhension au sein de la société géorgienne, en menant notamment des activités de sensibilisation auprès de l’ensemble de la population.

Le Comité consultatif est vivement préoccupé par le fait que ses recommandations antérieures relatives aux droits religieux des personnes appartenant à des minorités nationales n’ont pas été mises en œuvre. Réaffirmant que l’accès effectif aux lieux de culte est un élément essentiel de la pratique religieuse, le Comité consultatif juge préoccupant que les autorités n’aient toujours pas fixé de délai pour la restitution des biens confisqués à l’époque soviétique. En outre, il semblerait que de nouveaux problèmes d’appropriation illégale de biens religieux apparaissent. Cette évolution, combinée à la tendance à considérer certaines minorités comme une menace pour la sécurité, est inquiétante parce qu’elle engendre de la discrimination dans le domaine de la liberté de religion.

L’accès à la nationalité géorgienne reste un problème pour les personnes appartenant à certaines minorités nationales, à cause, le plus souvent, d’exigences linguistiques strictes et d’autres obstacles d’ordre pratique. La question de l’égalité d’accès aux droits continue de se poser, en raison notamment d’une maîtrise insuffisante du géorgien. À cet égard, Comité consultatif exhorte les autorités à prendre, en collaboration avec des représentants des minorités, des mesures efficaces, ciblées et fondées sur des données probantes pour remédier aux inégalités que subissent les membres des minorités nationales, et en particulier les minorités arménienne, azérie, kiste et rom.

Malgré les efforts des autorités pour dispenser des cours dans des langues minoritaires et de la langue nationale, la qualité de l’enseignement dans les établissements des minorités et dans les écoles en général reste souvent insatisfaisante, tandis que les contenus des programmes d’enseignement sur les cultures et langues des minorités nationales restent sporadiques et insuffisants. Sur un plan positif la mise en œuvre progressive, à compter de septembre 2023, d’un modèle d’enseignement bilingue pourrait, si elle respecte pleinement les dispositions de la Convention-cadre, aider à résoudre divers problèmes dans le domaine de l’éducation.

De plus, et malgré la remarquable promotion des cultures et identités des membres des minorités nationales, la contribution des cultures des minorités au patrimoine culturel de la Géorgie n’est pas suffisamment reconnue par le reste de la population. Un financement pérenne, y compris pour l’entretien ou la restauration des monuments du patrimoine culturel, ainsi que la mise à disposition de locaux appropriés, en portant une attention particulière aux minorités les moins nombreuses, sont nécessaires.

La participation insuffisante et peu satisfaisante des membres des minorités nationales à la vie politique, économique et sociale de la Géorgie est également préoccupante. Le Conseil des minorités ethniques et le Conseil des religions relevant du Défenseur public, qui constituent les principaux canaux par lesquels les représentants des minorités nationales dialoguent avec les autorités, sont inclusifs mais ne servent pas de mécanismes de consultation systématiques et formalisés. Le Comité consultatif préconise de rendre obligatoire la consultation de ces instances. Il exhorte en outre les autorités à veiller à ce que le cadre législatif prévoie des mécanismes effectifs permettant aux membres des minorités nationales, y compris les femmes, d’être dûment représenté-e-s dans les organes élus et les organes exécutifs à tous les niveaux.

Le Comité consultatif exhorte enfin les autorités à prendre toutes les mesures nécessaires pour préparer le prochain recensement, prévu en 2024, notamment en adoptant et en publiant le nouveau formulaire de recensement, qui devrait permettre de déclarer des appartenances multiples et proposer des options de réponse ouvertes et facultatives aux questions sur l’appartenance ethnique et la langue.

La Convention-cadre pour la protection des minorités nationales et la Géorgie

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La Convention-cadre pour la protection des minorités nationales est le traité européen le plus complet en matière de protection des droits des personnes appartenant à des minorités nationales. Il s’agit du premier instrument multilatéral juridiquement contraignant consacré à la protection des minorités nationales dans le monde. Sa mise en œuvre fait l’objet d’un suivi, assuré par un Comité consultatif composé d’experts indépendants. Entré en vigueur le 1er février 1998, le traité est maintenant en vigueur dans 39 États.

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