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La science-fiction des taux négatifs

De l’argent mieux que gratuitement, le monde à l’envers? Même les purs génies de la science-fiction économique n’auraient pas pu imaginer ça il y a 20 ou 30 ans. Les taux négatifs, c’est digne d’un épisode de Star Wars. Sauf que ce n’est pas que du cinéma. 

Ainsi, nous sommes entrés dans l’ère parfaitement inconnue des taux négatifs, qui viennent tout droit de la galaxie des banques centrales. Après la crise, en abaissant des taux directeurs à 0, en déversant des liquidités en abondance dans l’économie, en rachetant des dettes souveraines et d’entreprises, les banques centrales ont multiplié les expériences monétaires. 

En ce qui concerne les taux négatifs de banques centrales, seul le taux de dépôt en est arrivé à ce stade. La BCE a été la première grande banque centrale à innover et à abaisser son taux de dépôt en juin 2014 à -0,1%. Il est de -0,4% aujourd’hui et on s’attend dans les tous prochains jours à ce qu’il soit abaissé à -0,5%.

Qu’est-ce que ça signifie ? Quand les banques reçoivent les liquidités généreusement attribuées en échange de titres de dettes par Mario Draghi, elles préfèrent les garder en excédent de réserves en venant les placer dans les coffres de cette même BCE, en recevant un intérêt. Aujourd’hui, elle paie des intérêts pour que la BCE garde au coffre ces réserves.

Mais ce n’est pas fini. L’économie fonctionne en vases communicants.  La négativité des taux a contaminé le marché des obligations souveraines. 1/4 de la dette d’Etat émise aujourd’hui l’est à taux négatif. La France emprunte à taux négatif à 10 ans depuis cet été. Les entreprises empruntent elles aussi gratuitement. Enfin, en Allemagne, ce sont des crédits à la consommation qui sont maintenant accordés à taux négatif. C’est comme si le vendeur payait un client pour acheter un objet. 
Pourquoi les banquiers centraux font-ils cela ? Parce que l’inflation – leur principal objectif – est jugé trop basse et pour soutenir l’activité via le crédit. Avec, à court terme, un effet positif pour le budget des Etats. Elles empruntent gratuitement, donc autant ne pas se priver et investir à long terme.

Ceux qui achètent leurs obligations sont prêts à perdre un peu d’argent pour conserver dans leurs portefeuilles des actifs sûrs – ceux qui font l’objet de taux négatifs sont en général issues d’institutions bien notées, mais peu rentables. Ce qui signifie que l’environnement extérieur est tellement hostile, risqué et imprévisible, qu’aucun autre marché n’est attirant et que les investisseurs préfèrent payer pour ne pas prendre de risque que de prendre un risque. Alors que le risque, c’est le nerf de la guerre en économie. Mais, le risque aussi, n’est-il pas que les prêteurs finissent par ne plus être au rendez-vous ? Le film est inédit et personne ne connaît la suite. 

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