Le Gabon et la Guinée Équatoriale s’affrontent à la haye pour la souveraineté sur trois îles
Le mercredi 2 octobre, le Gabon a plaidé devant la Cour internationale de Justice (CIJ) de La Haye pour faire valoir sa souveraineté sur trois îles stratégiques situées dans le golfe de Guinée – Mbanié, Cocotier et Conga – face aux revendications de la Guinée équatoriale. Au cœur des arguments gabonais se trouve une convention bilatérale signée en 1974 à Bata, ville de Guinée équatoriale, document que Malabo qualifie de simple « bout de papier ».
L’argument du Gabon : un accord légal
Selon Libreville, cette convention constitue une preuve irréfutable de l’accord entre les deux pays, dans lequel la Guinée équatoriale reconnaît la souveraineté gabonaise sur ces îles et leurs eaux territoriales. Le Gabon a ainsi demandé aux juges de la CIJ de donner un poids légal à ce document, qu’il considère comme essentiel pour établir une base commune de négociation, permettant de résoudre le différend de manière pacifique et structurée.
La copie conforme du document : un défi, mais pas un obstacle
Bien que le Gabon n’ait pu présenter que la copie conforme du texte de la convention – l’original étant manquant – Libreville ne considère pas cela comme un obstacle insurmontable. Marie-Madeleine Mborantsuo, présidente honoraire de la Cour constitutionnelle du Gabon, a expliqué que cette copie avait été transmise en ampliation à l’ambassadeur de France à Libreville peu après la signature de l’accord, en octobre 1974, conformément aux pratiques diplomatiques de l’époque. Cette ampliation a été retrouvée dans les archives françaises, renforçant la légitimité du Gabon dans sa démarche.
Un document contesté par la Guinée Équatoriale
De son côté, la Guinée équatoriale remet en cause la validité de cette convention, qualifiant le document de « bout de papier » et contestant son poids juridique. Les avocats de Malabo estiment que ce texte n’a jamais eu de valeur contraignante et ne peut donc pas servir de base pour statuer sur la souveraineté des îles disputées.
Enjeux stratégiques du litige
Le différend territorial entre le Gabon et la Guinée équatoriale prend une dimension cruciale en raison des richesses naturelles potentielles que recèlent ces îles, en particulier les gisements d’hydrocarbures dans leurs eaux territoriales. Pour le Gabon, la reconnaissance de sa souveraineté sur les îles de Mbanié, Cocotier et Conga est bien plus qu’une question de droit international : c’est un enjeu stratégique et économique majeur. La possession de ces îles pourrait non seulement garantir l’accès à des ressources pétrolières, mais aussi renforcer la position géopolitique du Gabon dans le golfe de Guinée, une région riche en hydrocarbures.
La Guinée équatoriale, qui revendique également ces territoires, a envoyé à La Haye son ministre des Hydrocarbures et du Développement minier pour défendre sa position. Toutefois, Malabo semble vouloir minimiser l’importance des ressources pétrolières dans ce différend. Selon l’un des participants à l’audience, « le pétrole n’est pas la question centrale », bien que la présence de gisements dans la zone soit évidente.
Au-delà de l’enjeu des hydrocarbures, si l’île de Mbanié passait sous souveraineté équato-guinéenne, le Gabon pourrait voir son accès à la mer sévèrement restreint. Ce scénario pourrait affaiblir sa position dans la région, tant sur le plan économique que stratégique. L’accès aux eaux territoriales et à leurs ressources devient donc un enjeu vital pour Libreville.
Les juges de la Cour internationale de Justice (CIJ) ont entamé leur délibération et rendront leur décision dans les prochains mois. Pendant ce temps, le secteur pétrolier observe de près l’évolution du litige. « Les compagnies pétrolières surveillent attentivement la situation, flairant les opportunités à venir en fonction de l’issue de ce conflit », a précisé ce même participant. Leur intérêt montre bien que les enjeux économiques sous-jacents dépassent largement les considérations politiques.