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Les Gentils, les Méchants et l’épouvantail de l’ultralibéralisme

liliS’il est un terme dont personne n’est fichu d’expliquer le sens, c’est bien l’ »ultralibéralisme » (ou « ultra-libéralisme »). Pas étonnant, puisqu’aucune école d’économie ne porte ce nom et que personne ne se revendique de ce prétendu courant.En pratique, il s’agit d’un terme utilisé à tort et à travers pour déconsidérer un adversaire ou un ennemi politique. En effet, vu la connotation négative dont fait l’objet le libéralisme en France, quid de la crédibilité d’un politique qui serait un partisan acharné de cette doctrine ?Ainsi, le premier secrétaire du parti socialiste, Jean-Christophe Cambadélis, se réjouissait lundi de la victoire de l’ »ultra-libéral » François Fillon, victoire qui redonnerait selon lui des chances au parti socialiste en vue des prochaines élections présidentielles.Jean-Christophe Cambadélis, lui, n’est pas « ultra-libéral ». Il est « de gauche » et, comme l’explique Jean-Luc Mélenchon, être de gauche, c’est forcément être dans le camp des « pacifiques », des « humanistes », bref, dans le camp « des gentils ».MélenchonJean-Christophe Cambadélis est issu de l’extrême gauche (courant trotskiste lambertiste) et ce monsieur est aujourd’hui premier secrétaire d’un parti qui s’appelle toujours « socialiste ». En URSS, le « socialisme » désignait l’étape transitoire en vue d’établir une société proprement « communiste ». Aujourd’hui, l’idée socialiste persiste au sein du Parti socialiste qui se veut désormais « social-démocrate », c’est-à-dire en faveur de l’économie de marché dirigée et plus généralement d’un fort interventionnisme étatique.Jean-Luc Mélenchon a quant à lui fait le chemin inverse : après plus de 30 ans de parti socialiste, l’homme a créé sa propre enseigne, le Front de gauche, formation qui rassemblait jusqu’à récemment « plusieurs tendances de la gauche communiste, socialiste, écologiste, républicaine, de gauche radicale ou d’extrême gauche« .La mode dans ces milieux étant visiblement au dévoiement de la langue et au manichéisme, quelques rappels sont utiles.Le communisme est une utopie que doit permettre d’atteindre la phase intermédiaire du socialisme réel. Cette idéologie constructiviste prétend assurer le bonheur des hommes en permettant à l’Etat d’organiser la vie des individus en se substituant tous azimuts aux formes d’organisations spontanées. Grand dessinateur de ce plan imaginaire irréalisable, l’homme politique a tous pouvoirs sur l’individu qui est placé sur un lit de Procuste, et tous pouvoirs sur l’organisation de la société. La mise en pratique de cette doctrine politique par « le camp du bien » a toujours et partout débouché sur un pouvoir totalitaire. L’utopie communiste n’a jamais pu être atteinte et le bilan du socialisme réel se chiffre en millions de morts.

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Le libéralisme est une théorie du Droit indépendante du pouvoir politique et reposant sur la liberté
Au contraire, le libéralisme n’est pas une idéologie. C’est une théorie du Droit, neutre sur le plan de la morale, qui repose sur la notion de liberté et qui attribue aux individus des droits fondamentaux qui ne sauraient être ni octroyés, ni supprimés par le pouvoir politique. Le libéralisme n’est donc pas un constructivisme mais bien une doctrine juridique. Point d’utopie là-dedans.
Ceci posé, François Fillon est-il libéral ? Sur le plan des questions de société, le candidat aux primaires de la droite et du centre est conservateur, c’est-à-dire qu’il considère que l’Etat a un rôle à jouer en matière de moeurs et doit user de son pouvoir pour conserver ce qui est jugé « bon » (les « valeurs traditionnelles »). En cela, il se place sur le plan de la morale et il est un constructiviste de droite.
Sur le plan économique, François Fillon, qui a fait exploser la dette publique alors qu’il était à Matignon et qui prévoit tout de même d’augmenter la TVA de deux points s’il est élu président de la République, est tout au plus le moins étatiste des candidats de la droite et du centre.
Qualifier François Fillon d’ »ultra-libéral » démontre une méconnaissance totale du libéralisme.
Mais messieurs Cambadélis et Mélenchon, sont deux vieux routiers de la politique : ils savent que rabaisser le niveau du débat public est une stratégie qui s’avère souvent payante. Néanmoins, lorsqu’on en arrive à une situation où les mots sont à tel point détournés, il est difficile de s’étonner que les électeurs finissent par s’apercevoir de la supercherie et à voter autrement qu’il était prévu.
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Nicolas Perrin

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