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« Libérez le poivron ! » Résistance européenne contre la politique des brevets de Syngenta.

Une large coalition européenne, regroupant 34 organisations d’agriculteurs, de sélectionneurs ainsi que des ONG de 27 pays ont déposé aujourd’hui un recours devant l’Office européen des brevets, à Munich, contre un brevet sur le poivron accordé à Syngenta. Celui-ci permet à l’entreprise agrochimique bâloise de s’approprier une résistance aux insectes pourtant copiée d’un poivron sauvage. Par une action épicée, la coalition a dénoncé l’appropriation de la nature par des entreprises privées.

Le recours porte sur un brevet délivré à Syngenta, le 8 mai 2013 par l’Office européen des brevets (OEB), qui garantit à la firme bâloise les droits exclusifs sur tous les poivrons présentant une résistance aux mouches blanches. Ce brevet est valable dans de nombreux pays européens et empêche les agriculteurs et les sélectionneurs d’utiliser ces plantes pour leur culture ou leurs sélections sans payer des droits de licence à Syngenta. Or, cette résistance spécifique a été obtenue en croisant un poivron sauvage, de Jamaïque, qui comporte naturellement des résistances aux insectes, avec un poivron commercial. Il ne s’agit donc en aucun cas d’une invention, mais tout au plus d’une découverte.

Avec ces partenaires européens, le Réseau Semences Paysannes dénonce pleinement le brevetage du vivant. L’actualité française, notamment avec le vote demain à l’Assemblée Nationale d’une proposition de loi visant à mettre l’État au service des entreprises pour lutter contre les contrefaçons, illustre les conséquences inacceptables qu’auraient le développement de ce type de brevet couplé à la mise en place d’un arsenal juridique répressif. Le tout aboutirait à la remise en cause des droits les plus élémentaires des agriculteurs d’utiliser et d’échanger leurs propres semences sans risquer d’être qualifié de contrefacteur d’une plante contenant un caractère natif breveté …

Jamais auparavant une coalition aussi vaste d’un point de vue géographique et diversifiée au niveau des compétences n’avait engagé un recours juridique formel contre la privatisation des ressources naturelles. Les brevets sur le vivant sont non seulement problématiques d’un point de vue éthique, mais ils accentuent aussi le phénomène de concentration sur le marché des semences, réduisent la biodiversité et menacent la sécurité et la souveraineté alimentaire. En mai 2012, le Parlement européen avait pourtant adopté une résolution demandant à l’OEB de ne plus accorder de brevet sur des produits obtenus par sélection traditionnelle. Cependant, l’OEB a jusqu’ici ignoré cette recommandation. ce qui a permis à Syngenta et d’autres multinationales d’en profiter massivement

La coalition, déposant aujourd’hui à Munich ses recours contre le brevet de Syngenta, demande que les plantes et les animaux ne puissent plus être brevetés. La révocation de ce brevet sur le poivron serait déjà un premier pas important. Plus généralement, le Conseil d’administration de l’OEB doit modifier les critères d’octroi des brevets afin d’en exclure toutes les plantes et en priorité celles qui sont obtenues par sélection traditionnelle.

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