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LIVRE BLANC SUR LA DEFENSE ET LA SECURITE NATIONALE: FLOU CONCEPTUEL ET AMBITIONS RETRECIES

Un faible apport à la réflexion stratégique

C’est avec retard que la commission en charge du nouveau Livre blanc de défense et de sécurité nationale a présenté les résultats de ses travaux au Président de la République. Au vrai, on peut penser que l’actualisation du précédent Livre blanc, publié sous Nicolas Sarkozy, aurait suffi. Pour des raisons qui échappent à la grande politique, il en a été décidé autrement. Marquant un rétrécissement du champ de vision, le résultat final n’est pas d’un grand apport à la réflexion géopolitique. Aussi et surtout, ce Livre blanc annonce une nouvelle réduction des ambitions militaires françaises. Subrepticement, le processus d’attrition des forces armées met en péril le statut politique de la France, sa puissance effective et sa contribution diplomatico-stratégique à une Europe du grand large. 

| Un certain flou conceptuel

De prime abord, la lecture de ce document révèle des tours linguistiques significatifs des « temps présents», comme l’on dit pompeusement. Parler de « menaces de la force » (p.33), pour désigner de possibles guerres interétatiques, et de « risques de la faiblesse » (p.39), l’expression renvoyant aux menaces liées à la faillite de certains Etats du « Sud », n’est guère heureux. Simple question de forme ? « Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement – Et les mots pour le dire arrivent aisément » (Boileau). Dans la même veine, on notera les références multiples aux « femmes et aux hommes » au service de la défense, sans respect aucun pour la langue française. La post-modernité est aussi un âge post-littéraire, la pensée stratégique y perdant en précision, en clarté et en puissance.

Le chapitre relatif aux fondements de la stratégie française laisse apparaître un certain flou conceptuel. Après avoir situé la France dans le paysage stratégique mondial et rappelé son engagement dans diverses « constructions institutionnelles » (i.e. les instances euro-atlantiques et internationales), le Livre blanc explique que « le respect de la légalité internationale est un préalable intangible à tout recours à la force » (p. 23), ce qui induit la reconnaissance d’un droit de veto de puissances tierces, comme la Russie et la Chine, qui campent sur une vision restrictive de leurs intérêts étatiques et refusent d’assumer leur part du « fardeau » (cf. le « devoir de protection » adopté au sein de l’ONU). Pourtant, lorsque surgit une situation d’exception qui remet en cause la normalité, le droit demeure silencieux (seule la norme peut-être normée). Dès lors, c’est une décision souveraine qui s’impose. 

Si l’on se reporte à un cas géopolitique concret, le débordement de la guerre en Syrie, le recours aux armes chimiques et le risque de chaos régional pourraient conduire les puissances occidentales à passer outre le veto de Pékin et Moscou à l’ONU, pour intervenir de vive force. S’abstenir au nom de la légalité internationale et laisser ce conflit s’élargir, jusqu’à en perdre le contrôle, serait impolitique et partant illégitime. Assurément, la légalité et la légitimité ne doivent donc pas être confondues. Enfin, l’expression d’« Etat de droit » renvoie au règne de la loi à l’intérieur d’une unité politique donnée et elle ne saurait être employée pour décrire l’ordre international. En dernière instance, les régimes juridiques internationaux reposent sur la bonne volonté des Etats (le droit public international est un droit non point vertical mais horizontal).

Retrouvez la suite de l’article sur http://www.institut-thomas-more.org/

 

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