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On ne choisit pas l’économie, elle s’impose à nous. par Stephane Geyres

Lors d’un de ces tristes débats avec un mélenchoniste, où je tentais de lui faire comprendre l’intérêt de l’échange libre, celui-ci me rétorque soudain, avec ce tutoiement peu respectueux et spontané qui les caractérise : « En même temps, tu choisis l’économie monétaire plutôt qu’humaine… » Voilà donc qu’il y aurait deux types au moins d’économies et qu’on pourrait choisir librement entre elles lors de ces discussions qui animent la toile. Relativisme ambiant typique, où seul le « cœur » dicterait tout.
Pour être correct, je dois dire que je présume qu’il avait en tête le choix de 2 théories économiques différentes. Parler de l’économie humaine – le troc sans doute ? – n’irait pas loin dans un tel débat. Bref, c’est moi qui choisis mon sujet : Avons-nous vraiment le choix de la théorie économique dans un débat, et que pourrait être une théorie économique « humaine » mais pas « monétaire » ?
Tout d’abord, le choix d’une théorie. Sur ce point, il n’y a pas que les mélenchonistes qui montrent des difficultés, car ce sujet ressort tout aussi régulièrement lors de discussions avec des « libéraux », voire avec des « libertariens de gauche ». Pour expliquer l’idée de base, je passerai par la physique.
En physique, lorsqu’un phénomène est décrit et finit en une formule, par exemple le fameux e=mc2, il n’y a pas de choix de théorie. La formule est un aboutissement dans le travail de recherche, ici par Einstein, et la seule chose qui compte c’est que tout le monde reconnaisse que cette formule décrit bien ce qui se passe, ici que les relations entre masse et énergie sont celle d’une même identité. Il ne viendrait à l’idée de personne de parler de choix de théorie, car tout le monde a bien en tête que l’objet de la théorie est de décrire la réalité, et rien d’autre. Un jour peut-être on trouvera une formule encore plus générale qui décrit mieux la réalité, mais pour le moment, aucun doute permis.
Pourquoi alors faudrait-il qu’en matière d’économie l’objet de la théorie soit différent, qui ferait qu’une théorie pourrait être choisie en fonction notamment de la vision politique qu’on a de la chose sociale ? C’est bien évidemment une absurdité. La théorie économie, si elle existe, ne peut être que la description objective de la réalité sociale, ou sinon ne pas mériter d’être qualifiée de « théorie ». S’il y a théorique économique, celle-ci ne peut que s’imposer par sa fidèle expression de la réalité.
Pour la même raison, une théorie économique réaliste ne peut être qu’humaniste, puisque reposant sur la réalité du comportement humain dans ses rapports socio-économiques. La question du choix politique d’une théorie économique est donc une idée vouée à l’échec, conduisant à dire des bêtises. Elle repose bien sûr, depuis Marx au moins, sur cette conviction qui voudrait que les économistes et les gens en général ne pourraient lire et interpréter la réalité qu’à travers un biais, un prisme en lien direct avec leur situation sociale. Il n’y aurait donc pas de réalité, ou plutôt, elle serait inconnaissable.
Reste à trouver une théorie économique qui serait donc scientifique selon ces critères et de ce fait qui ne ferait pas question. Cela tombe bien, c’est le cas de la théorie dite autrichienne. Chance. Mais je sens déjà la question : mais qu’est-ce qui vous permet de l’affirmer ? Il faudrait bien plus que ce court billet pour répondre à ce qui a donné lieu à certains des ouvrages les plus complets de la science économique. J’espère juste aiguiser assez de curiosité du lecteur pour qu’il vérifie lui-même.
Disons simplement que la théorie autrichienne repose sur des concepts qui sont tellement simples, élémentaires même – le fait que chacun de nous prenne des décisions à chaque instant de sa vie – et sur une logique à la fois tellement rigoureuse et accessible qu’il est ainsi facile de se l’approprier et facile de constater la totale absence d’opinion politisée ou d’influence politique dans ses résultats.
Alors notre mélenchoniste et nos pseudo-libéraux ? Disons qu’ils sont le produit et le reflet d’un système d’enseignement pour le coup hautement politisé et qui veille bien à ne pas instruire ses ouailles afin que l’immense majorité reste ignorante de la chose économique et sociale et ainsi demeure loin de toute idée de remise en cause de la puissance publique et de son illusion.
Il nous faut positiver le mélenchoniste, finalement. C’est lui qui motive notre action d’information, ce devoir qui est le nôtre d’expliquer, expliquer encore en quoi et pourquoi l’état n’est pas notre avenir.

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