Présidentielle 2022 : Lettre à Madame la Présidente de l’Université de Nantes Par Benoit Fleury
Madame la Présidente et Chère Collègue,
Chère Carine Bernault
J’ai pris connaissance, comme la France entière de votre lettre adressée hier par courriel à l’ensemble des étudiants de l’université de Nantes, et appelant à voter pour le Président de la République afin de « faire barrage à l’extrême droite ».
Je m’autorise à y répondre publiquement puisque, selon toute vraisemblance, la publicité était l’effet recherché.
Tout comme vous, je suis particulièrement attaché à la diversité et la richesse de nos étudiants et nos amphithéâtres sont peut-être le dernier lieu où la contradiction s’exprime sans jugement. Tout comme vous, je suis extrêmement attentif à ce que nos universités préservent nos différences et bannissent toute forme de discrimination. C’est la raison pour laquelle je m’étais exprimé contre le protocole sanitaire qui nous obligeait à distinguer entre nos étudiants à raison de leur statut vaccinal. Sauf erreur de ma part, je n’ai pas eu connaissance d’une lettre en ce sens que vous auriez adressée par la même voie à l’ensemble de la communauté universitaire nantaise.
En revanche, sur la forme, je m’étonne de ces consignes de vote envoyées à l’adresse électronique personnelle de chaque étudiant en utilisant les ressources d’une institution publique. Gageons que la commission des comptes de campagne réintègrera le coût de cet envoi dans le compte de campagne du Président sortant.
Je m’étonne encore plus d’une telle démarche sur le fond. Nos étudiants sont de jeunes adultes, avec leurs expériences, leurs convictions, leurs rêves, leurs engagements. Ils sont parfaitement aptes à voter en leur âme et conscience et c’est me semble-t-il faire injure à leur intelligence propre que de leur donner une consigne de vote. Notre vocation consiste à leur transmettre un savoir, souvent une passion, à façonner leur esprit critique, à leur apprendre à construire une argumentation et non à leur asséner des poncifs. Le respect qu’ils doivent au corps professoral et à la communauté universitaire s’accompagne d’un respect mutuel que nous devons à leurs idées qui peuvent – et c’est heureux – être sensiblement différentes des nôtres.
Enfin, agiter le chiffon rouge de « l’extrême droite » pour désigner la candidate du Rassemblement National me paraît un discours non seulement éculé, mais politiquement faux et caricatural. Lionel Jospin avouait d’ailleurs en 2007 que l’antifascisme était du « théâtre » tant cette menace était inexistante. Il suffit de surcroît de jeter un œil rapide sur le programme du RN pour se convaincre qu’il est populiste, comme celui d’autres candidats au demeurant, et non d’une extrême droite fantasmée.
Combattez le RN sur le terrain des idées. Argumentez. Débattons dans nos cours. Mais sapristi, ne transformez pas nos facultés en Cours Florent.