Image Alt

Vudailleurs.com

Quel sens donner à la fête des pères ? Par Jean-Claude Beaujour

                                                            Jean-Claude Beaujour, avocat

Alors que la fête des pères est devenue un rituel bien installé dans l’agenda de notre début d’été il nous est venue l’idée de réfléchir à ce que pouvait vraiment représenter cette journée au-delà des marques d’affections qu’un certain nombre d’hommes peuvent recevoir ou donner.

Un peu d’histoire pour rappeler qu’à l’origine, la fête des pères est née au XVe siècle. Il s’agissait alors d’une fête religieuse, dont la date avait été fixée au 19 mars par le calendrier catholique, soit six jours avant l’Annonciation. Cette journée n’était pas destinée à fêter les pères, mais à célébrer la figure de Joseph, le père nourricier de Jésus. Ce n’est qu’au XIXe siècle que la tradition se développe, sous l’impulsion du pape Pie IX, avant de sombrer dans l’oubli au début du XXe siècle[1].

Aux Etats-Unis la première fête des pères non religieuse aurait été créée durant l’année 1910 pour rendre hommage aux papas à l’initiative de Sonora Smart Dodd élevée seule par son père, veuf. Elle déposa donc une demande auprès de l’état afin d’obtenir une journée dédiée à l’hommage paternel. En 1924, le président Coolidge proposa d’instaurer au niveau national la fête des pères et c’est en 1966 que cette date est devenue officielle dans tout le pays.

Sans conteste, la fête des pères est l’occasion de rendre hommage à son papa ou à son « vieux » comme si l’a joliment et pudiquement chanté Daniel Guichard[2]. Et pour celles et ceux qui n’ont pas connu leur père, parce qu’il est resté anonyme, qu’il est parti, qu’il est mort au combat, il y a certainement quelqu’un, quelque part, un homme qui représente à leurs yeux la quitessence de la figure parternelle.

Mais nous avons voulu nous interroger également sur le sens que l’on pouvait donner à la paternité aujourd’hui. 

Bien sûr chacun conviendra que l’on devient père au moment de l’arrivée de l’enfant au sein du foyer. Pour autant, on ne s’interroge guère sur ce qu’implique le statut de père car aucun texte n’indique de façon claire et précise ce qu’être père.

Tout d’abord, qu’est-ce que le père ?

Le dictionnaire Larousse en première définition considère qu’il s’agit de l’homme qui a engendré ou qui a adopté un ou plusieurs enfants.  Notre droit quant à lui définit le père essentiellement au regard de l’autorité parentale.

C’est ainsi que l’article 371-1 du code civil pose que « L’autorité parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant.

Elle appartient (l’autorité parentale) aux parents jusqu’à la majorité ou l’émancipation de l’enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à sa personne ».

[1] https://www.geo.fr/histoire/histoire-fete-des-peres-205052 [1] Etienne de Montely précise que Daniel Guichard n’est pas le premier à chanter Mon vieux. La chanson a été composée quelque dix ans plus tôt : paroles de Michelle Senlis, musique de Jean Ferrat. Le Figaro, 13 juillet 2011

Partant, l’article 371-2 du code civil retient que « Chacun des parents contribue à l’entretien et à l’éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l’autre parent, ainsi que des besoins de l’enfant ».

Si le premier réflexe de père est de reconnaître que nous devons subvenir aux besoins matériels des enfants dont nous avons la charge, encore hélas que beaucoup s’en dispensent – Un quart des parents séparés ne paient aucune pension alimentaire à leur ex-conjoint, bien qu’ils en aient les moyens financiers, indique une étude de la Drees rendue publique le 12 janvier 2021[3], il n’en demeure pas moins que la loi n’est pas limitative dans l’exposé des obligations qui pèsent sur nous.

Etre père, ce n’est pas seulement s’acquitter des obligations financières à l’égard d’un enfant. C’est en ce XXIe siècle, beaucoup et de loin, plus que cela.

La loi fait donc obligation aux parents, et donc au père, d’assurer la sécurité de l’enfant, sa santé, sa moralité et de faire son éducation. Tout un programme qui est d’autant plus compliqué que beaucoup de structures sociales d’encadrement ont évolué.

Etre père, c’est avant tout en toutes circonstances être à l’écoute de son enfant, à la fois lorsqu’il en exprime le besoin ou pour comprendre qu’il a besoin à un moment donné d’être écouté. C’est l’écoute qui permet d’être complice et de se comprendre sans jamais devenir des amis. Je ne suis pas et ne veux pas être l’ami de mes enfants, mais leur père.

Etre père, c’est transmettre des valeurs et des savoirs aux enfants afin de leur permettre d’évoluer dans un cadre précis. En effet, nous restons attachés à l’idée que vivre en société s’apprend et qu’il revient aux parents d’enseigner ce cadre de valeurs à leurs enfants. Ne jamais avoir peur de transmettre des valeurs fortes même si l’on peut parfois paraître en décalage avec son temps ; c’est l’ordre des choses et nous devons pas avoir peur de confronter nos enfants.   

Etre père, c’est accompagner les enfants à passer de l’enfance à la phase adulte de son existence en l’aidant à appréhender tous les sujets auxquels on est confronté à mesure que l’on avance en âge. Et pour cela, la donnée « temps » est essentielle. Il ne s’agit pas du volume temps que l’on passe avec son enfant mais de la qualité du temps qu’on lui consacre.

Chaque fois que nous dénonçons un acte de violence commis par un jeune, chaque fois que nous déplorons les incivilités de certains, mais aussi chaque fois que nous apprenons la survenance d’actes de violences commis sur un jeune, je ne peux m’empêcher d’être renvoyé à la lourde responsabilité de mon rôle de père qui s’imposera à moi tant que je vivrai sur cette terre !    


[1] https://www.geo.fr/histoire/histoire-fete-des-peres-205052

[2] Etienne de Montely précise que Daniel Guichard n’est pas le premier à chanter Mon vieux. La chanson a été composée quelque dix ans plus tôt : paroles de Michelle Senlis, musique de Jean Ferrat. Le Figaro, 13 juillet 2011

[3] https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/communique-de-presse/un-quart-des-parents-non-gardiens-solvables-ne-declarent-pas-verser-de-pension

Jean-Claude Beaujour, avocat

Postez un commentaire

You don't have permission to register