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Violence à l’égard des femmes en Suède : des progrès ont été marqués concernant la législation et l’éducation, mais la formation professionnelle doit encore être améliorée et une plus grande attention doit être accordée à la sécurité des femmes et des enfants dans les décisions sur les droits de garde et de visite

Strasbourg, 28.11.2024 – Dans son premier rapport thématique, le Groupe d’experts du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (GREVIO) salue les progrès continus de la Suède en matière de prévention et de lutte contre la violence à l’égard des femmes dans plusieurs domaines. Toutefois, les experts recensent également des domaines dans lesquels les autorités devraient prendre des mesures urgentes pour se conformer pleinement à la Convention d’Istanbul.

Le GREVIO se félicite des progrès continus de la Suède dans la criminalisation des comportements et dans l’introduction d’obligations qui vont souvent au-delà des normes de la Convention d’Istanbul, notamment avec la criminalisation de l’« atteinte à l’intégrité de l’enfant » et la lutte contre les suicides liés à la violence fondée sur le genre.

En outre, des mesures ont été mises en place pour protéger les enfants contre les mariages forcés et contre le fait d’être emmenés à l’étranger pour y être soumis à des mutilations génitales féminines.

Il convient aussi de mentionner que la nouvelle législation sur le viol qui repose sur l’absence de consentement a été intégrée au programme obligatoire d’éducation à la sexualité. L’entrée en vigueur en 2022 d’une disposition autorisant l’enregistrement vidéo des entretiens avec les victimes et les témoins comme élément de preuve au tribunal a été évaluée comme augmentant les chances qu’une affaire soit traitée avec succès tout au long de la chaîne de justice pénale, comme réduisant le fardeau des victimes qui devaient faire leur déclaration à plusieurs reprises et comme limitant le risque que des auteurs intimident des victimes pour qu’elles retirent ou modifient leurs déclarations antérieures.

Les conséquences de la réforme de 2018 relative au viol sur les pratiques des tribunaux sont particulièrement importantes : différents types de viol, tels que le « viol par surprise » et les situations où la victime est restée passive, peuvent notamment désormais faire l’objet de poursuites fructueuses, et les taux de condamnation ont augmenté.

Le GREVIO, qui reconnaît les progrès réalisés par la Suède dans la mise en œuvre de la convention, est préoccupé par la qualité de la formation des professionnel·les ayant un rôle clé. En effet, pour une large part, cette formation est facultative ou dispensée à une fréquence irrégulière, et elle omet souvent d’aborder les manifestations numériques de la violence à l’égard des femmes. Les professionnel·les ayant un rôle clé comprennent les travailleuses et travailleurs sociaux, le personnel de santé, les enseignant·es, les spécialistes du droit de la famille et les membres de l’ordre judiciaire. En ce qui concerne la formation des membres de l’ordre judiciaire, le rapport souligne la nécessité d’une formation obligatoire et approfondie, non seulement en matière pénale, mais aussi dans les affaires relevant du droit de la famille. Le GREVIO constate à ce propos que, dans leurs décisions sur les droits de garde et de visite, les juges omettent souvent de prendre suffisamment en considération les problèmes de sécurité et les besoins des femmes qui quittent un partenaire violent et de leurs enfants, font fréquemment abstraction des allégations de violences domestiques, acceptent des accords malgré les antécédents de violences domestiques, et invoquent (ou acceptent que soient invoquées) des notions infondées comme le « syndrome d’aliénation parentale », ou des notions similaires, pour rejeter des plaintes pour violences domestiques.

Un autre sujet de préoccupation est la rareté des structures de coopération interinstitutionnelle au niveau local pour les cas de violence domestique et la répartition géographique insuffisante des centres d’hébergement pour les victimes. Concernant l’orientation des victimes de violences domestiques vers des refuges, le GREVIO émet des réserves sur la pratique des services sociaux, qui orientent de plus en plus les victimes de violences domestiques vers des centres d’hébergement gérés par des entités à but lucratif plutôt que vers des refuges gérés par des organisations spécialisées dans le soutien aux femmes, qui ont pourtant une longue expérience dans le domaine de la violence à l’égard des femmes.

Le GREVIO se félicite des mesures globales prises pour lutter contre les formes graves de violence à l’égard des femmes et notamment les violences commises au nom de « l’honneur » et encourage les autorités à veiller à ce que ces politiques ne se traduisent pas par une stigmatisation de certaines communautés de personnes migrantes.

Enfin, les autorités devraient prendre les mesures nécessaires pour prévenir la violence dans les foyers de jeunes et harmoniser la collecte de données sur toutes les formes de violence à l’égard des femmes et de violence domestique entre les services répressifs, le ministère public et le pouvoir judiciaire.

Voir les commentaires du gouvernement (en anglais uniquement)

Le GREVIO et la Suède

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Le GREVIO est l’organe d’experts indépendant chargé de suivre la mise en œuvre de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (dite « Convention d’Istanbul ») par les Parties. Ouvert à la signature de tous les pays du monde, en plus des 46 Etats membres du Conseil de l’Europe, le traité a été ratifié jusqu’à présent par 38 Etats et l’Union européenne, et signé par six autres.

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