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Le retour de l’insécurité alimentaire au Brésil Par Maya Cottet-Emard

En 2022, 59% de la population brésilienne se trouve en situation d’insécurité alimentaire et la faim touche 15.5% des foyers. 33 millions de personnes ne mangent pas à leur faim, soit l’équivalent de la population du Pérou ou de la Hongrie. Les différentes formes d’insécurité alimentaire impactent davantage les populations rurales, notamment dans les régions du Nord et du Nord-Est.

La faim et l’insécurité alimentaire témoignent des inégalités structurelles historiques du pays. Le sexe, la position sur le marché du travail ou la couleur de peau sont des indicateurs aggravants et se combinent aux inégalités régionales du Brésil. En 2022, l’enquête nationale sur l’insécurité alimentaire, menée par le Réseau national de chercheurs sur la souveraineté et la sécurité alimentaires au Brésil (Réseau PENSSAN), révèle que 65% des familles en situation d’insécurité alimentaire étaient majoritairement composées par des personnes noires et que 18% d’entre elles sont en situation de faim.

L’inflation croissante qui touche le pays est un des facteurs expliquant ce retour. Les produits de premières nécessités sont les plus touchés par cette hausse des prix : riz et haricots rouges. Ils constituent la majorité de l’alimentation des personnes les plus précaires, les protéines étant trop chères.

Les familles les plus modestes se reposent essentiellement sur la nourriture fournie par les écoles publiques, pour que leurs enfants puissent manger au moins une fois par jour. Sous le mandat de Jair Bolsonaro, le budget alloué aux écoles a fortement baissé. Par conséquent, les élèves y mangent moins bien.

Troisième producteur alimentaire mondial en 2020 selon la FAO, le Brésil continue de battre des records en matière d’exportations alimentaires, passant de 85 milliards de dollars en 2016 à 120 milliards de dollars en 2021.

« Ils exportent de la nourriture dont la population brésilienne a besoin, mais évidemment c’est plus lucratif d’exporter que de vendre ces aliments au Brésil. Prenons l’exemple de la guerre en Ukraine. Avec la guerre, le blé manque en Europe. C’est alors plus intéressant financièrement pour le Brésil d’envoyer le blé sur le continent européen que de le garder dans le pays, alors que l’on en manque. On nourrit le monde mais en meurt de faim.» – Entretiens avec trois jeunes actifs cariocas : Laura de Guama, Pedro Paulo Bordini Rocha et Yuri Vivianna

Le gouvernement de Jair Bolsonaro a placé l’agrobusiness au centre de ses politiques alimentaires et supprimé le Consea (Conseil national de sécurité alimentaire et nutritionnelle), entraînant avec lui le système de sécurité alimentaire et nutritionnelle (Sisan). Le président d’extrême-droite se permet même de provoquer à ce sujet : « Avez-vous déjà vu quelqu’un demander un morceau de pain dans une boulangerie ? Non, vous ne l’avez pas vu ! ». Il va jusqu’à affirmer que « la vraie faim » n’existe pas dans son pays.

Entre l’inflation, la pandémie et les politiques publiques de Jair Bolsonaro, la sécurité alimentaire au Brésil a pris un coup. Lula, nouvellement réélu, a sorti des millions de brésiliens de la faim au cours de ses premiers mandats, avec le programme « Fome Zero ». Le 23 décembre, il renouvelle sa volonté de « faire disparaître le pays de la carte de la faim ».

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