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Les raisons du voyage de Guterres et d’Erdogan en Ukraine pour rencontrer le président Zelensky Par Alexandre Lemoine

Ce jeudi 18 août, le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres et le président turc Recep Tayyip Erdogan s’entretiendront à Lvov avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky. Ils évoqueront la mise en œuvre de l’accord sur l’expédition de céréales ukrainiennes ainsi que la situation relative à la centrale nucléaire de Zaporijia, qui est contrôlée par l’armée russe et qui subit des tirs de l’armée ukrainienne et où une délégation de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) pourrait y être envoyée prochainement. 

Vendredi, M. Guterres se rendra à Odessa, puis, le lendemain, à Istanbul pour visiter le Centre de coordination conjointe de l’expédition des céréales. Il ne fera pas escale à Moscou. 

Pendant la rencontre trilatérale à Lvov, ce n’est pas le secrétaire général de l’ONU qui sera le principal « pacificateur », mais plutôt le dirigeant turc, qui a joué un bien plus grand rôle dans l’accord céréalier. Même si, c’est bien M. Guterres qui avait initialement proposé de conclure un tel accord. Dans l’ensemble, l’accord fonctionne sans accrocs et n’a pas besoin d’une correction urgente à un niveau politique aussi élevé. 

Les interlocuteurs parleront de la mort de combattants du régiment Azov dans un centre de détention d’Olenivka ainsi que de la sûreté du bon fonctionnement de la centrale nucléaire de Zaporijia. 

À la veille de sa visite en Ukraine, M. Guterres s’était déjà entretenu par téléphone sur ces deux questions avec le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou. Toutefois, on ignore tout du résultat de cette conversation. Kiev souhaite la création et l’envoi sur place d’un groupe spécial de l’ONU pour enquêter sur la situation à Olenivka. Ce qu’on appelle une mission d’établissement des faits. De son côté, le ministère russe de la Défense insiste sur sa version des faits qu’une baraque avec des prisonniers d’Azov a été attaquée par un lance-roquettes multiple (LRM) Himars faisant 50 morts. Le ministère russe a également appelé les experts de l’ONU et du CICR à enquêter sur cet incident. Mais il reste visiblement des questions quant à la procédure d’une telle enquête. 

Une question encore plus sérieuse concerne la sécurité de la centrale nucléaire de Zaporijia. Les médias occidentaux relayent souvent des déclarations ukrainiennes comme quoi c’est l’armée russe qui tire sur Enerhodar et l’infrastructure de la centrale. Tout en ajoutant que les deux camps s’accusent de tirs réciproques, sans chercher, particulièrement, à comprendre pourquoi les forces russes contrôlent la centrale depuis mars se bombarderaient elles-mêmes.

D’après l’Occident, c’est tout de même Moscou qui est responsable de la situation dangereuse autour de la centrale. C’est pourquoi l’UE avec des représentants de 42 pays a récemment appelé la Russie à retirer ses troupes de la centrale. « Le déploiement du personnel militaire et d’armements russes sur un site nucléaire est inadmissible et enfreint les principes de sécurité, de protection et de garanties que tous les membres de l’AIEA se sont engagés à respecter », indique le communiqué commun. 

De son côté, Kiev avance la thèse selon laquelle il est nécessaire de démilitariser la zone de la centrale, ce qui dans la pratique signifierait son passage sous le contrôle de l’armée ukrainienne. Ce que ne conviendra certainement pas à Moscou. 

Pour sa part, l’AIEA n’avance pas encore d’exigences politiques mais appelle les parties à laisser des spécialistes de l’agence entrer sur le territoire de la centrale.

L’ONU soutient absolument l’idée d’envoyer des experts de l’AIEA à la centrale. D’après Antonio Guterres, cette organisation possède à la fois des capacités logistiques et la possibilité d’assurer la sécurité d’une telle mission lors de son voyage à travers le territoire ukrainien depuis Kiev. 

Il faut savoir que le secrétariat de l’ONU n’a pas le pouvoir de bloquer une telle activité de l’AIEA. Et, la dernière condition qu’il reste à remplir pour envoyer un tel groupe de l’AIEA, c’est d’obtenir de l’Ukraine et la Russie une entente sur l’accueil de cette mission sur les territoires qu’elles contrôlent à l’heure actuelle.

Plus tôt, Moscou et Kiev se disaient prêts à recevoir des inspecteurs. Mais il sera très difficile de s’entendre sur les procédures, car chaque partie voit différemment les objectifs de cette mission. Kiev veut imposer l’idée de la « démilitarisation » et avance aujourd’hui une nouvelle thèse que la Russie vole l’électricité de la centrale ou compte le faire. Moscou préférerait que les inspecteurs, s’ils arrivent à la centrale, confirment que tout y fonctionne de manière normale et sûre. Cependant, il n’y a visiblement pas de certitude que les inspecteurs de l’AIEA arriveront à cette conclusion précise.

Alexandre Lemoine

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