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Privatisation d’ADP : qui se cache vraiment derrière le RIP ?

Etienne de laforclaz

Faire fi de la représentation nationale et ignorer toute l’importance du travail parlementaire pour interroger les citoyens sur une nouvelle loi. Voilà résumée l’intention du Référendum d’Initiative Partagée. Alors que 90% des sympathisants La France Insoumise et 76% des sympathisants PS se disent, aujourd’hui, prêts à le signer, l’intérêt pour ce nouveau gadget constitutionnel s’essouffle. A ce moment précis, analyser qui intervient pour ranimer la flamme est apparu très instructif.

En Avril dernier, Boris Vallaud, député PS des Landes annonçait, en grande pompe, le recours au Référendum d’Initiative Partagée (RIP), devant l’Assemblée. Oubliant qu’il est élu pour représenter les électeurs, élaborer et voter les lois, l’ancien conseiller d’Arnaud Montebourg et successeur d’Henri Emmanuelli porte au pinacle cette nouvelle démocratie participative si tendance chez la gauche : « Au-delà du sujet de fond, il y a un enjeu démocratique majeur qui est la réussite de cette première expérience démocratique de référendum d’initiative partagée. C’est-à-dire d’un dialogue fructueux entre des représentants et des citoyens électeurs. »

L’époux de Najat Vallaud-Belkacem, fit, dès le lancement mi-juin, alliance avec la France Insoumise et les dernières survivances du PCF pour lancer le site Signons.fr. Le bruyant Insoumis, François Ruffin, appelait alors : à « libérer toutes les énergies », souhaitant une campagne « pluraliste ». Las de la démobilisation, voilà que Monsieur Vallaud racolait tout l’été ! Tablettes connectées à la main, lui et d’autres parlementaires Socialistes, Rémi Féraud et Valérie Rabault, sillonnèrent les quais de Seine, très fréquentés l’été, pour démarcher les potentiels signataires.

A la gauche de la gauche, la démocratie aurait disparu

D’autres ont préféré la fraicheur de leur bureau mais n’ont pas hésité à appeler ostensiblement à signer le référendum sur les réseaux sociaux comme la sénatrice Socialiste du Val-de-Marne, Sophie Taillé-Polian, proche de Benoît Hamon.

Plus à gauche encore, le référendum fait perdre la raison. Pour les syndicats les plus durs les institutions de la Vème République seraient devenues totalitaires. Méprisant notre circuit législatif – il faut le souligner, encore très efficace –la CGT s’est égarée à voir dans le RIP un retour à la démocratie rejoignant l’Humanité qui récemment titrait « Du RIP au RIC, en quête de démocratie ».

Demander le RIP, la spécialité socialiste

Inquiets devant la stagnation des signatures, les Mélenchonistes et le PS se mobilisent pour réclamer, en parallèle, une campagne d’information télévisée sur la procédure du référendum. « Je souhaite que le service public soit un appui à l’exercice des droits démocratiques et de la citoyenneté », écrivait, en juin dernier, Alexis Corbière, député LFI et ancien de la LCR, à Delphine Ernotte, Présidente de France Télévisions. Constatant son échec, d’autres, à gauche, prenaient le relai. Le 23 juillet, Patrick Kanner, chef de file des sénateurs Socialistes convoquait le Président du CSA pour exiger qu’il impose cette campagne d’information, évoquant un « droit à l’information civique ».

Beaucoup ont découvert le RIP avec Monsieur Vallaud, mais ce n’était pas une première pour les Socialistes. En janvier 2019, le PS s’essayait déjà à l’exercice pour rétablir l’ISF à la recherche d’un trophée en vue des Européennes. Le projet échoua dès la première étape faute de réunir les 185 soutiens parlementaires nécessaires et fut étouffé. « C’est un combat, car il n’y a pas de majorité naturelle [au Parlement] en faveur de notre référendum. », avait à l’époque reconnu la numéro 2 du PS Corinne Narassiguin.

Vice caché et information à la clé, signataires on vous observe

On l’oublierait trop rapidement. Le vote est secret, mais pas la signature d’une pétition. Comme le prévoit la loi organique de 2013 : « La liste des soutiens apportés à une proposition de loi peut être consultée par toute personne. » Les signataires sont donc fichés, publiquement, par le Ministère de l’Intérieur. Ironie de l’histoire ce sont les Socialistes qui avaient souhaité cette publicité. Jean-Pierre Sueur, sénateur PS et rapporteur du texte, y était très favorable. Aujourd’hui, cette absence d’anonymat est, à coup sûr, un frein, au grand dessein de la gauche. Pour le lecteur, elle n’en est pas moins très instructive. Le traitement des premières données de la plate-forme collectant les paraphes ont ainsi permis à Jérôme Fourquet, directeur du département opinion de l’Ifop, et Sylvain Manternach, géographe, d’établir un portrait de la France du RIP. « Elle vote à gauche, est diplômée et dispose d’un capital culturel important. Une France « bobo », en somme. » En détails, les signataires sont majoritairement franciliens et inscrits sur les listes des arrondissements de l’EST : Xéme (5% des électeurs ont signé), XIème et des communes de l’est parisien, comme les très bobos Montreuil (4,37%) et Pantin (3,43%) ou la populaire Saint Denis (3,44%).

Dégotté bien opportunément parmi les artifices constitutionnels, le RIP n’est rien d’autre qu’un mépris profond de ceux que nous avons élus pour faire les lois. Depuis le premier jour, Socialistes Insoumis et Communistes font feu de tout bois et portent à bout de bras ce référendum d’un nouveau type pour tenter de montrer qu’ils forment une opposition encore crédible. Signer le RIP c’est donner sa voix à la gauche. Aujourd’hui RIP le RIP, laissons le référendum en paix !

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